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Mourad Messoubeur

PMarguerite Pilven
@12 Jan 2008

Le peintre Mourad Messoubeur a décidé, depuis 8 ans maintenant, d’abandonner ses pinceaux et pigments industriels pour développer un travail à partir de la matière vivante. Pour cela, il transforme son atelier marseillais en une véritable cuisine où marmites et réchauds ont remplacé les traditionnels outils du peintre.

La pomme, et la pomme de terre sont les deux composantes à partir desquelles l’artiste travaille, les soumettant à toutes sortes d’expérimentations biologiques. Choisissant d’une part un fruit, de l’autre une racine, Messoubeur développe une métaphore dynamique du cycle de la nature, du recyclage de la matière.

Après avoir évidé une pomme de terre, l’artiste laisse la chair se décomposer et place les moisissures ainsi obtenues sur un support préparé, un « milieu de culture ». Celles-ci prolifèrent, se contaminent entre elles, développant un micro-organisme aux couleurs et textures étonnantes. Ensuite, ces cultures sont placées entre deux verres. En fixant ces traces vivantes, qu’il convertit en une surface plane et délimitée — la surface de l’œuvre — Messoubeur en suspend la transformation, en gèle le devenir. La réalisation de l’œuvre équivaut ainsi à une conservation.

Une autre technique est également à l’œuvre, qui ressemble fortement au procédé de la fresque. Messoubeur étale la chair de pomme de terre sur un mur de son atelier, réalisant alors une « serre murale » puis transfère à l’aide de papier de soie la « peau » formée par les spores du champignon qui s’est développée.

Les tableaux prennent parfois la forme de diptyques ou triptyques, où l’artiste expose simultanément une pomme coupée en deux, les « peaux » obtenues par les milieux de culture, et une pomme de terre. L’articulation est ainsi faite entre ces différents moments du cycle de transformation de la matière. On embrasse d’un seul regard ce mouvement naturel de mort et de régénérescence, le lent travail du temps sur ces organismes vivants.

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