DANSE | CRITIQUE

Micadanses. Festival Faits d’Hiver. Yuval Pick. Living in Pieces

30 Jan - 30 Jan 2008
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@30 Jan 2008

Le corps de Yuval Pick est en métamorphose constante. Ses bras gesticulent, ses jambes se désarticulent. Le danseur cherche un équilibre dans l’instabilité constante d’une vie.

Pénombre, un corps allongé au fond de la scène. Jambes et bras mêlés entre eux. Le corps est immobile, mais il reste en tension, il semble prêt à s’élancer vers le haut.

Le solo du chorégraphe Yuval Pick est une séquence de moments de tension et de détente. Le sol est composé par un collage de morceaux de carton, scotchés entre eux par des bandes noires. Quelques-uns sont marqués ‘fragile’. Ainsi, le sol représente un lieu prêt à se casser à chaque moment, d’où le danseur ne peut pas s’échapper. Pick lutte en effet avec le sol, il doit y retomber chaque fois qu’il a trouvé un élan dans la danse. Quelquefois il marche, change de place, semble trouver un équilibre, se replier sur ses pensées, puis le corps perd le contrôle et recommence une lutte pour ne pas tomber, ne pas rester collé au sol.

Le corps danse sur place, il n’évolue jamais dans l’espace, les bras et les jambes cherchent autour du tronc, cherchent lentement d’abord, puis rapidement, l’instant d’après. Le chorégraphe cherche un équilibre avec son corps, qui semble lui échapper. Il se jette contre le sol, quelquefois la tête la première — la danse devient dangereuse — mais il parvient à retrouver rapidement l’équilibre, à se maintenir debout.

Il danse souvent au centre de la scène, qui est éclairée, puis il tombe sur les côtés, qui sont restés dans la pénombre. Il peut rester figé dans des poses : une main couvre sa bouche, cette action se répète, signe d’incertitude d’où une nouvelle phrase dansée prend son départ ; de l’une ou des deux mains l’index s’échappe et commence à pousser le bras, puis tout le corps, vers le haut.

Le solo Living in Pieces a été créé en septembre 2007, dans le cadre du forum art4lux de la jeune création européenne au Luxembourg. Le corps évolue sur la musique du groupe des années 1980 Joy Division, dirigé par le chanteur Ian Curtis. Le chorégraphe s’inspire aussi de la gestuelle convulsive du chanteur. Des bribes de chansons sont collées à des bruits qui semblent provoqués par des objets qui se cognent, qui tombent, se brisent. Espace et son enveloppent le corps dans une incertitude où la danse trouve son origine, sa force.

Au début, les extraits des chansons semblent être des bredouillements, puis ils deviennent clairs, et dans ces instants le danseur n’est plus incertain, c’est lui qui décide quand quitter le sol, quand s’y jeter. En outre, Yuval Pick se replie tellement sur lui-même que le spectateur voit s’effacer sa forme humaine, laissant place à des figurations plus proches de l’animal ou apparaît une chair en continuelle transformation.

Yuval Pick hypnotise le public, narre un moment existentiel de construction et de déconstruction de la pensée et des actions, dans le doute ou dans la certitude, dans l’euphorie. Après seulement 15 minutes, les applaudissements accueillent le chorégraphe épuisé par ses métamorphoses.

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