ART | CRITIQUE

MaLeVoLeNcE

PFrançois Salmeron
@28 Nov 2012

Donelle Woolford semble avoir usurpé l’identité de Richard Prince, artiste notamment connu pour avoir peint des blagues sur des toiles, et revisite par là tout le répertoire burlesque et graveleux des Etats-Unis. Ainsi, l’exposition «MaLeVoLeNcE» est fondamentalement malicieuse et use de facéties, tout en interrogeant un art dit d’«appropriation».

«MaLeVoLeNcE» propose une série de «joke paintings» pour le moins décapantes. En effet, Donelle Woolford s’est approprié la démarche de l’artiste américain Richard Prince, connu pour avoir notamment repris les cow-boys de Marlboro. Ces photos étaient l’occasion de sonder le mythe de la virilité américaine affrontant les grands espaces, avec une cigarette au bout des lèvres. Richard Prince a également jeté son dévolu sur de jeunes infirmières qu’il représenta en séries, et a surtout participé à ce que l’on nomme l’art d’«appropriation».

Soulevant de nombreux débats, dont ceux du plagiat ou de la propriété intellectuelle, l’art d’appropriation réemploie du matériel artistique produit par une tierce personne, utilise le collage, et propose des copies ou des manipulations d’œuvres préexistantes. Or, il s’avère qu’en 2008, un photographe français, Patrick Cariou, porte plainte contre Richard Prince pour atteinte au droit d’auteur. Richard Prince est alors condamné pour avoir utilisé des photographies du livre Yes Rasta, réalisé par le photographe français. Il s’était servi de ces photographies pour composer des collages dans ses propres Å“uvres.

Par là, la démarche de Donelle Woolford est originale en ce qu’elle interroge une problématique propre au domaine de la création artistique et du marché de l’art. Elle n’est pas non plus dénuée d’humour puisqu’elle reprend à son tour les conceptions de Richard Prince, artiste qui a lui-même recyclé et réutilisé les œuvres d’autres créateurs. Donelle Woolford décline ainsi une dizaine de «joke paintings», procédé que Richard Prince avait l’habitude d’utiliser. Et les œuvres de «MaLeVoLeNcE» ont une portée d’autant plus cocasse qu’elles chroniquent les aventures d’un personnage justement prénommé Richard.

Ainsi, les peintures de Donelle Woolford sont des collages de papiers où sont inscrites des blagues en caractère dactylographié. Les écrits sont biffés au marqueur, à la peinture acrylique ou au stylo bille, parfois raturés, ou bien encore coloriés. Ils s’inscrivent dans une tonalité on ne peut plus graveleuse, en faisant directement référence à des histoires salaces tirées d’un répertoire américain de blagues, sorte d’inventaire du mauvais goût: Richard chez le docteur, Richard et sa voisine, Richard et sa prof de musique… On vous laisse aisément deviner la suite. A moins que vous ayez besoin d’un dessin?

Remarquons également que la galerie Air de Paris propose des Joke Paintings de Donelle Woolford jusqu’au 1er décembre 2012.

Å’uvres
— Donelle Woolford, Doggy Style, 2012. Stylo bille, impression jet d’encre sur papier PVA sur toile. 173 x 112 cm
— Donelle Woolford, s-a-s-k-a-t-c-h-e-w-a-n, 2012. Stylo bille, impression jet d’encre sur papier PVA marouflé sur toile. 173 x 112 cm
— Donelle Wollford, Neo Dada, 2012. Stylo bille, impression jet d’encre sur papier PVA marouflé sur toile. 173 x 112 cm
— Donelle Woolford, Ding Dong, 2012. Stylo bille, impression jet d’encre sur papier PVA marouflé sur toile. 173 x 112 cm

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