ART | EXPO

L’indécise lumière tout autour, frissonnante et sans origine. Peintures

26 Sep - 09 Nov 2008
Vernissage le 26 Sep 2008

Les peintures de Nicolas Delprat questionne la lumière, avec pour référence directe le travail d’artistes tels que Dan Flavin ou James Turrell, et de cinéastes tels que Stanley Kubrick ou David Lynch.

Nicolas Delprat
L’indécise lumière tout autour, frissonnante et sans origine. Peintures

Le Frac Auvergne consacre deux expositions simultanées à Nicolas Delprat. Les deux projets que réalisera ce jeune peintre diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts de Lyon, ancien élève de Bernard Frize, s’intègrent dans le cadre d’un cycle conçu par le Frac Auvergne autour des problématiques afférentes aux questions de l’image, de son traitement pictural et des relations que la peinture contemporaine entretient avec d’autres médias comme la photographie, le cinéma et la transformation numérique des images.

Ce cycle, développé de septembre 2008 à mars 2009, accueillera les expositions de Nicolas Delprat, Eberhard Havekost et Johannes Kahrs.

La peinture de Nicolas Delprat ouvre un champ de réflexion sur la valeur de la lumière dans la peinture contemporaine. La problématique de la lumière traverse toute l’histoire de l’art du XIVème et du XXe siècle, de l’invention de la photographie jusqu’aux néons de Dan Flavin et aux environnements de James Turrell.

Bien avant, déjà, Rembrandt, Vermeer, de La Tour, Le Lorrain ou Turner tentaient d’en apprivoiser les propriétés pures, mais il est clair que l’avènement technologique entamé par la photographie, poursuivi par le cinéma et la vidéo puis porté à son acmé par les possibilités manipulatoires de l’informatique ont considérablement étendu le domaine de réflexion des peintres sur ce sujet, orientant la peinture vers de nouveaux paradigmes.

Les oeuvres de Nicolas Delprat se développent selon trois axes. Le premier concerne des peintures étroitement référencées à des oeuvres préexistantes qui utilisent la lumière comme matériau. Dan Flavin, James Turrell, John Armleder sont ainsi des noms que l’on retrouve dans les titres de certains tableaux.

Ainsi, le report d’une sculpture minimale de néons de Dan Flavin sur une toile à l’aide d’acrylique provoque t- il la rematérialisation d’une aura luminescente et impalpable initialement distribuée dans l’espace tridimensionnel sur une surface plane.

Ainsi, la reproduction d’un environnement de James Turrell, basé sur la création d’un espace infini par une luminosité diffuse, pose-t-elle la question de la reproduction illusionniste d’une oeuvre immatérielle.

La seconde catégorie regroupe des oeuvres qui citent directement le cinéma en reprenant certains détails de films : les diodes rouge orangées de l’ordinateur HAL du film de Stanley Kubrick « 2001 : l’Odyssée de l’espace », la lumière apocalyptique d’un paysage martien extrait de « Total Recall » de Paul Verhoeven, la façade en contre-jour, crépusculaire d’une villa tirée de « L.A. Confidential » de Hanson, le mot « Silencio » issu de « Mulholland Drive » de David Lynch…

La citation du cinéma par la peinture n’est pas une nouveauté en soi mais ce qui peut être intéressant dans les choix opérés par Nicolas Delprat repose sur le fait que la plupart de ces films entretiennent un rapport particulier avec la littérature : « 2001 » est une adaptation de la nouvelle « La Sentinelle » d’Arthur C. Clarke, « Total Recall » est réalisé à partir d’une nouvelle de Philip K. Dick, « L.A. Confidential » est à l’origine un roman de James Ellroy, « Dune » est un roman de Frank Herbert.

Ces films constituent donc des tentatives de transposer nouvelles ou romans en histoires projetées sur un écran en leur donnant une matérialité et une subjectivité.

Les peintures de Nicolas Delprat référencées au cinéma ne le sont donc pas par hasard : il est toujours question du passage d’un état à un autre, d’un média à un autre, de la littérature au cinéma… Elles produisent une mutation supplémentaire, du cinéma vers la peinture, en utilisant une touche hyperréaliste qui n’est pas sans rappeler les calicots cinématographiques peints à la main ou les mate paintings, ces peintures sur verre utilisées pour les effets spéciaux et les décors avant la révolution de l’imagerie de synthèse.

Toutes ces peintures jouent par ailleurs d’un travail axé sur la mémoire résiduelle des films référents car, en réalité, aucune des images peintes par Nicolas Delprat ne peut être retrouvée telle quelle dans les films dont elles sont supposées être issues.

Un troisième type d’oeuvres provoque un investissement direct du langage cinématographique par la production d’images qui, bien que ne se référant pas à un film particulier, semblent pourtant appartenir sans le moindre doute à la syntaxe du genre.

Les peintures de la série « Zone » sont de pures images cinématographiques dont on ne sait si elles sont empruntées à « Dead Zone » de Cronenberg, à « Rencontres du Troisième Type » de Spielberg…

Elles n’appartiennent à aucun de ces films et appartiennent à tous ces films. Elles fabriquent du stéréotype, de l’image type, du cliché de film fantastique, du cliché de thriller. Il en va de même pour ces peintures représentant les contrastes appuyés d’ombres de fenêtre projetées sur le sol.

On y retrouve le cinéma expressionniste de Fritz Lang et l’influence des architectures mise en scène par Max Reinhardt. Dans ces oeuvres, il s’agit de procéder au basculement de l’image vers sa possible abstraction, d’utiliser une syntaxe stéréotypée issue du cinéma pour la défragmenter vers le champ de la peinture.

En somme, il s’agit par ces trois types d’oeuvres de procéder dans un premier temps à la transposition d’oeuvres préexistantes – Flavin, Turrell, Armleder…, d’en évaluer la puissance quasi cinématographique, puis de basculer vers la citation pure pour enfin procéder au télescopage de l’histoire de l’art et du cinéma en élaborant une fabrique de clichés qui ne soient pas tout à fait ancrés dans l’abstraction et qui ne soient plus complètement connectés au registre filmique.

Du 3 octobre au 8 novembre 2008
Nicolas Delprat au Galeries Lafayette.

Publication d’un catalogue
.

AUTRES EVENEMENTS ART