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Lift Off

PMaxime Thieffine
@12 Jan 2008

Pour sa première exposition personnelle, le jeune peintre allemand Jan Kämmerling présente des toiles à la géométrie déformée, à la symétrie retorse et aux contrastes colorés. Entre équilibre et distorsion, une peinture de surfaces glissantes.

A cheval entre une tradition hard edge (lignes droites, couleurs en à plat coupées à vif) et shaped canvas, Jan Kammerling organise le conflit entre les zones de couleurs (grises, noires, orangées) et la forme de la toile (carrés et rectangles, ou presque). La couleur devient un élément du support et participe du cadre et du format de la toile. Alors que le cadre, lui, déformé, prolonge la composition picturale et colorée. Comment procède-t-il ?

Le meilleur exemple de son travail est visible dans These Purists, diptyque bichrome (orange et noir), constitué de deux panneaux de toile peinte juxtaposés. Le plus long panneau, à droite, est parfaitement horizontal et juxtaposé à une toile presque carrée qui semble se décrocher et glisser du mur, plongeant au centre du diptyque à l’endroit où devrait se faire la jointure entre les deux panneaux. Une fissure, un triangle s’ouvre là et dévoile les dessous de la peinture, le mur, comme un accroc sur une robe dévoile une surface de peau inattendue.

Il manque une partie à cette deuxième partie, son bord intérieur est oblique, sa tranche extérieure est par contre bien perpendiculaire au sol et parallèle à l’autre panneau. Ce couple désaccordé au niveau du format se raccorde néanmoins par le motif qui les traverse, une large bande de peinture orange. Bande brisée mais dynamique et néanmoins continue.
La couleur très vive et découpée perturbe ainsi la lisibilité du format des supports. Comme si ces oeuvres voulait jouer avec tout ce qui les entourent: jouer à la fois avec les perpendiculaires du sol, avec le plan du mur, avec la toile qui s’étire, avec les châssis que l’on découpe et avec les pigments qui vibrent dans les yeux du spectateur.

Les degrés d’obliques et de toile en moins sont compensés ou rajoutés en plus et ailleurs sur la toile et selon un autre angle. Ici une fissure verticale est compensée par une excroissance horizontale. La géométrie, le calcul et les proportions sont entrées ici dans un jeu paranoïaque, un jeu de perte et de compensation, de glissements et d‘immobilisation.

Ancien étudiant de Jan Dibbets, on peut voir chez lui, une poursuite des déformations et corrections de la perspective de Dibbets, mais appliqué ici à la peinture. Dans son rapport à l’accrochage et au support mural et par extension à l’architecture environnante. Proche d’Ellsworth Kelly, Jan Kämmerling trouve logiquement sa place chez Jean Brolly entre les pratiques géométriques et ludiques de François Morellet et les jeux de découpes bi- et mono-chromatiques de Allan Charlton.

Jan Kämmerling
— These Purists, 2007. Laque sur toile. Dimensions diverses.
— Sans titre 12 P, 2006. Laque sur toile. 46 x 61 cm.
— Sans titre, 2006. Laque sur toile. 183 x 150 cm.
— Skipper, 2006. Laque sur toile. 153 x 180 cm.
— Iceberg-Graphite, 2006. Laque sur toile. 180 x 153 cm.
— Iceberg Burnt out, 2006. Laque sur toile. 65 x 160 cm.
— Sans titre, 2006. Laque sur toile. 65 x 160 cm.

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