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Les Années d’hiver

La réédition des Années d’hiver, épuisé depuis presque vingt ans, répond à plusieurs motifs qui sont autant de nécessités théoriques et politiques. À chaque ligne s’imposent l’acuité brûlante, la force anticipatrice, la valeur d’éclairage et d’outillage pour aujourd’hui de ces textes de Félix Guattari.

Information

Présentation
Félix Guattari
Les Années d’hiver

Si le nom de Félix Guattari a le plus souvent été associé à celui de Gilles Deleuze, et en quelque sorte maintenu dans l’ombre de ce dernier, l’ctualité éditoriale témoigne néanmoins d’un regain d’intérêt pour son oeuvre théorique ainsi que pour sa trajectoire militante et intellectuelle. Ainsi, après la publication en 2005 des Écrits pour l’Anti-Oedipe, qui apportent un éclairage nouveau sur le rôle de Guattari dans la genèse de cet ouvrage phare des années 1968, paraissent en 2007 la Biographie croisée de Deleuze et Guattari, ainsi que Micropolitiques, que ce dernier a écit en collaboration avec Suely Rolnik.

À cette actualité éditoriale vient s’ajouter un mouvement de réévaluation des années 1980, qui apparaissent désormais comme une période de transformations profondes sur les plans idéologiques et politique: la prise en compte du « grand cauchemard des années 80 », ainsi que François Cusset, l’auteur de la préface, qualifie cette décennie, apparaît désormais comme un élément central de la généalogie du néolibéralisme contemporain.

C’est à une compréhension nouvelle de cette période que contribue la réédition des Années d’hiver, épuisé depuis plus de vingt ans. Cet hiver mondial des premières années 1980, avec ses poussées droitières, son triomphe du marché et ses nouveaux esclavages subjectifs, Guattari en pressent avec une puissance inouïe la dimension de mutation historique et de tournant anthropologique. Entre textes théoriques et interventions liées à l’actualité de la période, cet ouvrage offre également l’une des meilleurs introductions possibles à l’oeuvre de Guattari.

De la candidature de Coluche et la montée conjointe du racisme et du Front national, à la « schizo-analyse » et au dialogie critique avec l’oeuvre de Foucault; de l’art contemporain à la recherche d’alternatives politiques et vitales dans des champs multiples, c’est toute une époque et tout un appareil théorique qui se dessinent. Au cours de ces années 1980 que Guattari évoque comme étant celles du « retour de bâton réactionnaire », l’urgence d’adapter et de réinventer une pensée critique est plus présente que jamais.