LIVRES

L’Effondrement du temps. Pénétration 1

L’imp(a)nsable est l’auteur collectif d’un laboratoire des écritures-dés-emparées : des plasticiens, écrivains, poètes, cinéastes et philosophes ont mêlé le cri de leur métamorphose en un geste radical qui fait muter la philosophie en roman. Parmi les recherches philosophiques, littéraires et plastiques contemporaines, cet objet est un nouveau genre de roman, de revue et de livre d’art.

— Auteur(s) : L’imp(a)nsable
— Éditeur : Le Grand Souffle, Paris
— Année : 2006
— Format : 17 x 23 cm
— Pages : 400
— Illustrations : Noir et blanc, couleur
— Langue : Français
— ISBN : 2-9164292-01-1
— Prix : 28 €

Présentation
«Car l’Homme a fini ! L’Homme a joué tous les rôles !»
Nous sommes entrés, irréversiblement, dans l’ère des périls extrèmes du fait humain. Le cyclotron du temps, où s’accentue la tétanie d’avenir, entraîne notre espèce vers son heure critique. Chaque jour qui passe réduit les «options» de notre «opsis» à une terrible alternative ; muter ou disparaître. Muter, mais vers quoi ? Et comment ? Là, béant, s’ouvre en complexité le champ du futur. Pour autant cependant qu’il nous soit donné d’en examiner les profils, et de toute façon, le prix à terme de nos seules perspectives sera tragique : le prix de l’ex-orbitant.

En effet, par la force aavec laquelle elles s’imposent maintenant à nos vies quotidiennes, les technologies hyper-industrielles de l’image et du son relèvent précisément d’un dispositif de destruction massive des consciences assujetties au programme de la marchandise, autrement dit à « du temps de cerveau disponible pour Coca-cola », pour reprendre la terrible formule de Patrick Lelay, directeur de TF1.

Désormais source des profits les plus juteux, les images-sons qui pénètrent nos flux psychiques dans leur immense majorité — mais que nous consentons d’abord à nous projeter nous-même —, nous crève littéralement les yeux et les tympans. Aveuglés et assourdis d’exténuation devant leur non-sens et leur violence continue, nous devenons progressivement inaptes à former nous-même les visages de nos vies. L’organisation de la cécité et de la surdité collectives a déjà pris le contrôle de la civilisation mondiale.

Mais ce n’est pas tout. Les progrès actuels de la technique et de l’industrie génétique, laissent également poindre à l’horizon du milieu de siècle la possibilité d’une industrialisation progressive de chacune des parties du corps humain, et par là-même d’une substitution extensive des fonctions organiques — notamment la fonction de reproduction — à celles, entièrement artificielles, issue des imminentes victoires de l’ingénierie médicale.

Ainsi le couplage du contrôle technique, financier (et militaire) des flux audiovisuels avec celui des industries informatiques,, robotiques et génétiques permet d’entrevoir pour un jour relativement proche que la quasi-totalité des idées, émotions, pulsions et structures organiques de la majorité des homo sapiens soit réduite au régime impitoyable de la marchandise à l’échelle planétaire.

La gravité de cette pente que nous suivons pour la plupart les yeux grand fermés, et que nulle intervention humaine ne semble aujourd’hui en mesure d’empêcher radicalement, signifie bien davantage qu’un déclin de la culture. Elle ouvre pour la première fois au regard non seulement la pérspective d’une industrialisation sans limites du genre humain, mais surtout celle, proprement tragique, d’une robotisation sourdement consentie, inavouablement souhaitée, et en fait activement promue par nul autre que nous-mêmes…

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions Le Grand Souffle — Tous droits réservés)

English translation : Laura Hunt