ART | EXPO

Le Pli

06 Juin - 06 Juil 2013
Vernissage le 06 Juin 2013

«Le Pli» est le fruit d’une résidence croisant art et sciences que Javiera Tejerina-Risso a effectué au sein du CNRS à Marseille dans le laboratoire de Patrice Le Gal, et au cours de laquelle, l’artiste et le scientifique ont souhaité reproduire le processus de la vague.

Javiera Tejerina-Risso
Le Pli

Depuis quelques années, Javiera Tejerina-Risso développe une œuvre autour de «l’apprivoisement du flux, qu’il soit migratoire, urbain, informatif, sanguin et par extension vers tout ce qui circule ou se transforme comme les fluides, les rivières ou les océans» (Javiera Tejerina-Risso, 2010).

Elle emprunte à la science certains corpus qu’elle détourne pour son propos. Elle use d’images extraites d’expériences de scientifiques pour en faire tout autre chose. Elle délègue à la science et aux expériences la création de ces images tout en s’autorisant ensuite à travailler sur la matière qui lui est ainsi apportée.

Pour cette exposition, elle est allée plus loin que l’emprunt d’images et/ou de films à des scientifiques. En effet, elle est à l’origine, avec Patrice Le Gal, du processus créateur de ces dernières. Les œuvres réalisées induisent un sentiment de familiarité tant le processus de création de la vague, ici immortalisé, nous est proche. Lydie Marchi, mai 2013.

«C’est l’histoire d’une combinaison de forces, d’énergies qui vont obliger l’eau à se plier, à se froncer. La vague naît alors. Elle devient. D’une masse informe, à cet instant précis elle devient elle même, cette vague là. Similaire à la précédente, pas complètement pareille à la suivante. C’est une lutte incessante entre l’atmosphère et l’océan. La limite insaisissable entre les deux. Poreuse, vibrante, mutante, fragile. Les forces qui régissent l’océan sont parfois difficiles à étudier par le monde scientifique mais la surface de l’eau suscite un grand intérêt pour les recherches en mécaniques des fluides afin d’étudier d’une part les forces de l’eau et par analogie celles de l’air.

Lors de ma résidence, j’ai eu l’occasion de mener une recherche conjointe art et sciences. Mener un tel projet signifie de trouver le point de convergence entre deux milieux différents qui partagent la même fascination à observer le monde et plus précisément une fascination par les flux. Patrice Le Gal, chercheur en mécaniques des fluides étudie, reproduit, analyse et crée des modèles relatifs aux phénomènes liés au flux, puis il diffuse son expertise parmi ses pairs. En tant qu’artiste, le flux est un matériau que je peux utiliser dans mes pièces vidéos ou installations grâce à ses caractéristiques physiques, sa plasticité mais aussi son évocation d’une réminiscence du temps qui passe: la mémoire.

Je filme la mer et je manipule sa temporalité. Je joue de ses flux et reflux. L’eau est multiple par essence, symbole d’impermanence, c’est à la fois éternel et en constant changement. C’est ce paradoxe qui m’interpelle. Au laboratoire, nous avons continué les travaux expérimentaux engagés par Le Gal sur la focalisation des vagues. De mon point de vue, le fait de recréer une vague, de l’isoler dans le bassin fût pour moi une opportunité de sculpter l’eau, la vague elle même afin de lui donner les caractéristiques que nous souhaitions. De la vague puissante de l’océan nous sommes arrivés à une forme suave, fragile, délicate: notre vague.

Dans le bassin, de l’eau calme surgit la vague, elle prend forme, elle avance, elle devient vague. Puis, en un laps de temps furtif, elle éclate dans une sublime beauté pour disparaître. Elle perd ainsi son identité, son unicité pour s’évanouir dans l’eau. La géométrie de l’espace, la forme évolutive de la vague est alors synonyme de temps. Pour tenter de saisir l’ensemble de la transformation de la vague, il fut nécessaire d’utiliser une caméra rapide (2000 images par secondes). Grâce à cette vitesse de capture on a pu saisir les différentes formes que la vague revêt lors du déferlement. C’est cela que je voulais saisir, la forme qui s’échappe, qui s’enfuit.

Nous avons mis en place différentes expériences afin de parvenir à la forme parfaite, symétrique qui convergeait et déferlait au point exact décrit par la théorie du Cusp Z3 –a Z – b = 0. Puis, nous avons réussi. Nous l’avons trouvé cette forme qui répondait à nos deux besoins, celui de l’artiste et celui du chercheur. C’était notre moment magique, celui du partage et de fascination par un objet commun retrouvé. C’est cet instant précis. Cette convergence d’une recherche scientifique et artistique sur le déferlement de la vague, le pli; cette tension entre l’air et l’eau qui sera ici exposé.»
Javiera Tejerina-Risso, janvier 2013.

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