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Le Lustre

PAnne Kawala
@12 Jan 2008

Dessins à l’encre de chine de paysages urbains. Les noirs et les blancs sont ponctués d’aquarelles colorées. À chaque feuille correspond un paysage urbain. Chacun d’eux comprend une grille sous-jacente, réseau de construction, qui supporte et dissèque. En récurrence dans chacun de ces paysages urbains, un arbre.

Des dessins sur un format unique (avoisinant le format raisin) pour des supports de natures variées. Parfois le verre, écho à la vitrine derrière laquelle, sans entrer dans la galerie, le spectateur peut découvrir la pièce de Florentine Lamarche; souvent le papier. Un papier blanc au haut grammage et d’autres plus fins, rouge, orange, vert, jaune, bleu…: tous se côtoient.
Juxtaposés, papier, verre, papier, papier, devant, derrière, nouvel écho à cette vitrine; jamais laissés seuls, les dessins discutent, respirent, parlent aux contraintes de l’espace. Du visible au sous-sol entr’aperçu du dehors, la vitrine n’est plus suffisante.

Dessins à l’encre de chine de paysages urbains. Les noirs et les blancs sont ponctués d’aquarelles colorées. À chaque feuille correspond un paysage urbain. Chacun d’eux comprend une grille sous-jacente, réseau de construction, qui supporte et dissèque. En récurrence dans chacun de ces paysages urbains, un arbre. Un signe, et surtout le dessin d’une matière: l’arbre en tant que rythmie d’un environnement visuel quotidien. Son surgissement abrupt dans un espace urbain le rend, ici, repère.

Quels liens entre ce triple espace (dehors, dedans, dessous), ces multiples format raisin et leur agencement mural, les dessins et leur mode opératoire, l’encre noire et l’aquarelle, et enfin ce titre étrange: Le Lustre.

Du geste au contexte: la même rigoureuse opération.

Dans ces paysages urbains, l’arbre opère d’une façon identique. Il est signe. Il encadre, cache, supporte. C’est par ce focus que le paysage se compose, ici, sous le regard de Florentine Lamarche.
Le premier croquis réalisé est une photographie, une notation à vrai dire, rapide et pas même conservée. De là, comprendre le réel par la déstructuration de l’image: une découpe en carrés pour une reconstitution par le dessin. À la surface, les fragments carrés flottent, dérivent et parfois s’agrègent.
Ce mécanisme de reconstruction, rend la verticalité des troncs insuffisante pour faire signe. Ce sont par les écorces, les feuilles que l’arbre devient pivot du paysage urbain. Le signe par la matière.
Traduit par la densité d’une encre noire, les dessins vifs sont ponctuation de l’espace feuille. La trace exhausse en découpant, en incisant vite, avec plaisir, et peut-être aussi avec brutalité.

La matérialité comme pivot: pas seulement la représentation d’un objet, fût-il un arbre. Il y aurait à souligner les aquarelles, plus tendres. Et la nature des supports. Qui permettent une lecture par bond.

La linéarité n’existe plus: regarder est choisir. De multiples compositions, alors, s’offrent. Ne regarder que les surfaces vitrées. Passer de l’une à l’autre. Puis, parce que glissé en dessous d’une vitre, l’orange d’une feuille capte le regard, une autre lecture s’amorce. Ainsi des successions de narrations sans finalité s’enchâssent. Il y a là d’immenses dessins interconnectés desquels la taille serait, à chaque fois, le mur entier.

Le lieu, donc, entre dans la composition de l’ensemble. Comme les contraintes spatiales s’y prêtent, l’immense dessin composé par les unités raisin, se déploie sur plusieurs murs. Le Lustre use du dessus et du dessous.
Du visible de l’extérieur à ce qui le devient uniquement à l’intérieur. L’arbre est encore convoqué, ramage visible, fourni, et intouchable — trop haut? derrière la vitrine —, jusqu’aux racines étiolées — contexte urbain oblige? Quoi qu’il en soit c’est la matérialité du représenté qui est interrogée.

Le Lustre
Les cristaux d’un lustre, traversés par la lumière, la diffractent. Apparaissent leurs ombres multiples, déformées, et lumineuses. Cette image, convoquée par le titre, Le Lustre n’est peut-être pas la plus adéquate à cet sorte de jeu logique et complexe. Car les oeuvres de Florentine Lamarche ne s’inscrivent pas dans un rapport à la production surnuméraire de l’image d’un objet que son regard aurait traversé. D’autant moins qu’il s’agit dans sa pratique du dessin, d’un rapport à la matière bien plus qu’à la transparence.

Les dessins et l’agencement de Florentine Lamarche pour Le Lustre proviennent d’un modus operandi, précis mais déjouable. Car par le dessin, ce sont les rapports connexes et transversaux tel qu’une forme à une matière, un portrait d’un être aimé à un objet quotidien, etc., qui sont exhaussés. Et, de même, si la question de la relation de la construction du dessin à l’agencement d’un ensemble de dessins à un espace reste centrale, le systématisme d’une réponse confortable n’existe pas. Le modus operandi décrit ici est à chaque fois réinterprété.

English translation : Margot Ross
Traducciòn española : Santiago Borja

Florentine Lamarche :
— Le Lustre, n.d. Dessins sur supports mixtes.

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