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Le génie des apparitions

PJulia Peker
@12 Jan 2008

Xavier Zimardo photographie le déchaînement luminescent de couleurs qui embrase la fête indienne de la Holi, consacrant la toute puissance de la foule et l’effervescence aveuglante du pigment.

A l’arrivée du printemps, en ce jour d’équinoxe symbolique où la nature s’arrache à son hibernation brumeuse, les indiens célèbrent un rite qui embrase le pays tout entier. La fête de la Holi est une de ces grandes orgies collectives où se déchaîne la puissance de la foule, exaltée par le sacre de la fertilité et l’euphorie licencieuse.

Si Xavier Zimbardo a consacré toute une série de photographies à cette tradition ancestrale, c’est parce que la Holi est d’abord la fête des couleurs. Pendant deux jours entiers, hommes et femmes s’aspergent et s’embrument de pigments, se les jettent au visage et se recouvrent d’une épaisse couche écarlate.

Il a composé d’imposantes images nimbées de teintes spectaculaires, des visions surnaturelles d’individus transportés par l’effervescence rituelle, perdus dans l’immensité du grand corps social déployé pour l’occasion. Tous se rendent à la fête munis de cette poudre multicolore vendue en vrac, le gula, et personne n’échappe à ce véritable bain de foule et de couleurs où volent en éclat les distinctions sociales.

Recouverts d’une épaisse couche de pigments humides ou poudreux, visages et vêtements perdent leur contours propres, se laissent absorber par une transe aveuglante où retentissent les cris de joie.
Nimbée de cette picturalité sauvage, la photographie est transfigurée de bout en bout, restituant tour à tour la consistance minérale des fresques ou l’éclat huileux de la toile.

Célébration plastique s’il en est, la Holi est un carnaval où la couleur suffit à brouiller les repères et les codes habituels, à revêtir chacun d’un masque épais sous lequel les traits s’effacent.
C’est ce délire orgiaque que Xavier Zimbardo est parvenu à capter, plongeant à corps perdu dans un déchaînement carnavalesque. Délivré de la trame docile du tissage et de la forme, le pigment est restitué à sa puissance aveuglante. Pluie, poudre, fumée, la couleur est saisie dans sa pure matière lumineuse, emportant la foule et le ciel dans une déflagration multicolore.

Xavier Zimbardo
— Varanasi, Le flux des incantations, 2005. Tirage Lambda, 120 x 180cm. 1/7 +4 EA
— Phalen, le passage du jeu, 2007. 120x180cm. 1/7 +4 EA
— Holi, la puissance du vivant, 2007. 180x120cm. 1/7 +4 EA
— L’invisible souffle du vent si blanc, 2007. 90 x 60cm. 1/10 +4 EA
— Varanasi, les bûchers du Manikarnika, 2005. 120 x 180cm. 1/7 +4 EA
— Holi, Le sacre des couleurs, 1993. 150 x 228 . 1/3 +2 EA
— La Femme en Jaune, 1982. 180x120cm. 1/7 +4 EA

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