ART | CRITIQUE

L’Avenir se ride

PMagali Lesauvage
@12 Jan 2008

A travers une série d’installations au sens difficile, usant de l’accumulation comme du dispositif multimédia, l’exposition de Franck David «L’Avenir se ride» interroge le rapport à l’identité et au temps.

L’entrée de la galerie Chez Valentin est inopinément fermée par une porte de garage irisée, elle-même bloquée. Cette absurdité dénommée L’Attente annonce une série d’œuvres dont on a parfois du mal à capter le sens.

Au fond de la salle d’exposition proprement dite est inscrit en larges caractères le mot «Générique», inclus dans l’installation Pas d’histoire, pas de film, pas. Des néons clignotent au rythme d’une musique aléatoire diffusée par une antique enceinte Marshall. L’ensemble n’évoque en effet aucune histoire. Du moins a-t-on l’impression d’être arrivé «après» l’histoire, ou à la fin du film, au moment du générique, quand les lumières se rallument timidement.

Au centre de la pièce, un ballon couleur argent,Figure, flotte grâce à une soufflerie perpétuelle.

L’œuvre la plus intéressante est certainement l’installation Casting. Sur de simples étagères de bureau sont disposées des boîtes affichant l’effigie d’individus homonymes de l’artiste (qu’on devine très nombreux). A l’intérieur des boîtes sont placés des masques en latex moulés sur nature. L’artiste interroge de possibles doubles/doublures «prêt(e)s à ré-interpréter le réel», c’est-à-dire à prendre sa place, à lui voler sa vie. Le film En raison d’un manque total d’intérêt demain est annulé pendant toute la durée du générique réalise cet augure. Pour mieux les maîtriser, Franck David classe ces figures du double, leur assigne une place dans des cases précises, en somme les prend au piège. On retrouve ici l’obsession qui présidait à la mise en œuvre de l’installation Celluloïd présentée en 2002 au Palais de Tokyo. Dans Casting, cette rhétorique de l’accumulation est mise au service d’une interrogation sur sa propre identité.

Le titre de l’exposition, «L’Avenir se ride», évoque un questionnement sur le temps: l’avenir se rétrécit, se fane au fur et à mesure que la mort approche. Le générique de fin amène l’artiste à s’interroger sur lui-même, ses obsessions, ses manques. Franck David ne date jamais ses œuvres, préférant les laisser voguer dans un temps flou, perpétuel, avant qu’elles ne finissent par se déposer dans les interstices, les «rides» de l’avenir.

English translation : Begüm Sekendiz Boré.

Franck David
L’Attente, n.d. Installation, rideau métallique.
Pas d’histoire, pas de film, pas, n.d. Installation, néon, bande-son aléatoire, enceinte.
Figure, n.d. Installation, ballon de couleur argent, soufflerie.
Casting. n.d. Installation, étagères, boîtes, masques en latex.
En raison d’un manque total d’intérêt demain est annulé pendant toute la durée du générique, n.d. Film.

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