ÉCHOS
21 Sep 2010

Larry Clark: les photos de l’artiste américain sont taxées de pédophilie

PElisa Fedeli
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Pour se mettre à l’abri d’une polémique et de la véhémence des milieux chrétiens, la Mairie de Paris a préféré interdire aux mineurs la rétrospective du photographe Larry Clark, qui sera présentée au Musée d’art moderne à partir du 8 octobre 2010.

Le Musée d’art moderne de la Ville de Paris annonce la première rétrospective en France du photographe américain Larry Clark. L’artiste est connu pour son sujet de prédilection, l’adolescence, qu’il traite en pionnier depuis le début des années 1960.
Révéler le malaise de jeunes marginaux, pris dans la spirale infernale drogue-sexe-armes, constitue la force essentielle de son œuvre. Son premier recueil de photographies, Tulsa (1971), privilégiait déjà une approche documentaire et sans fard. A l’instar de Nan Goldin, son travail a ouvert le champ de la photographie à une nouvelle esthétique qualifiée de «trash». Il est aujourd’hui représenté dans les plus grandes collections publiques — telles que le MoMa et le Whitney Museum pour ne citer qu’eux.

L’approche de Larry Clark a également influencé le monde du cinéma, le réalisateur Gus Van Sant se réclamant volontiers de sa filiation. Tous les deux ont démontré que «les films mettant en scène des adolescents ne sont pas forcément des comédies bébêtes». La violence des situations que l’on trouve dans ces images ne doit donc pas occulter leur regard critique, en particulier sur la société américaine.
«C’est étonnant de constater que la culture américaine est orientée vers la jeunesse, mais qu’elle ne lui parle pas vraiment. Je veux que les kids se reconnaissent en voyant mes films, c’est très important pour moi», a déclaré Larry Clark (Cahiers du cinéma, oct. 2003).
En dépit de cette noble intention, la plupart de ses productions cinématographiques sont interdites au jeune public. La rétrospective intégrale, prévue à la Cinémathèque française en parallèle de l’exposition, insiste sur ce point.

Aujourd’hui, rares sont les expositions d’art interdites aux mineurs. On se souvient d’«Éros», une exposition de la Bibliothèque nationale de France consacrée aux ouvrages de «L’Enfer», ce lieu fantasmé des réserves où sont conservés les textes jugés contraires aux bonnes mœurs. Les commissaires d’exposition avaient justifié cette interdiction comme «une mesure de prudence prise par la Bibliothèque, afin que quelque ligue de vertu ne puisse (leur) reprocher de pervertir la jeunesse».

Les mêmes accusations pèsent sur l’exposition des photographies de Larry Clark, les milieux chrétiens dénonçant «le caractère pédophile et pornographique» de cette œuvre «nauséabonde» (site Chrétien info). Symptôme d’une époque marquée par les scandales pédophiles, la suspicion pèse désormais sur toute association de l’enfance avec le sexe. Et le champ de l’art n’échappe pas à cette surveillance…

Reste que le jeune public pourra toujours avoir accès au catalogue de l’exposition, publié par la Galerie londonienne Simon Lee.

RÉFÉRENCES
Sites internet
Présentation de l’exposition : http://www.mam.paris.fr/fr/node/203
Reproductions de photographies de Larry Clark : http://larryclark.blogg.org/
Présentation de l’exposition Eros : http://chroniques.bnf.fr/numero_courant/expositions/enfer_bibliotheque.htm

Recueils photographiques de Larry Clark
Tulsa, 1971
Teenage Lust, 1983
1992, 1992
The Perfect Childhood, 1993.

Filmographie :
Kids, 1995
Ken Park, 2002
Wassup rockers, 2004
Destricted, 2010.

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