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La Vie

PNicolas Villodre
@03 Avr 2010

Le peintre berlinois René Wirths fait dans l’hyperréalisme, dans le trompe-l’œil, mais sans passer par l’étape photographique. Il peint des fragments dans sa vie quotidienne devant son motif, dans son atelier, à la lumière du jour.

Le peintre berlinois René Wirths prélève des fragments dans sa vie quotidienne, qu’il peint obsessionnellement, délicatement, méticuleusement. Il en présente six échantillons à la galerie Daniel Templon: un papillon, le portrait d’une jeune femme, un dessin de sa fille, un morceau de pain biologique, une main et un autoportrait.

Le dessin de la fille Clara de l’artiste (Clara Zeichnung) ouvre l’espace. Les arbres, les flèches, les oiseaux, le ciel vus par le regard de l’enfance sont agrandis avec une précision photographique. Impossible de voir, donc de savoir, de prime abord, que nous avons affaire à une représentation et non à une reproduction. René Wirths, on l’apprendra par la suite, fait dans l’hyperréalisme. Autrement dit, dans le trompe-l’œil.
De fait, ses toiles n’ont pas la même valeur — y compris marchande — que des reprographies mécaniques! Compte tenu du rapport entre la surface peinte et le rendu de la moindre particularité — du piqué pictural, si l’on peut dire —, on peut penser que chaque œuvre lui a pris plusieurs mois d’existence. Ou que le peintre aura pris plaisir, tout ce temps-là, à se perdre dans les détails.

René Wirths ne passe pas du tout par l’étape ou le média photographique, qui sert généralement de béquille aux peintres, depuis Delacroix, surtout à ceux qui font dans le naturalisme, le réalisme et l’hyperréalisme. Il peint devant son motif, dans son atelier certes, mais à la lumière du jour.
Cela explique qu’en y regardant de plus près on se rend compte de la subjectivité du regard de l’artiste, de sa vision très personnelle du monde, de son travail technique et sensible dans l’interprétation de ce qui l’environne — son tableau le plus «fidèle» à la réalité étant peut-être celui qui traite du dessin enfantin…

Le cadrage est centré sur un objet, un personnage, un élément isolé. Le fond de la toile étant immaculé, René Wirths peint généralement avec des teintes plus sombres qu’à l’accoutumée. La main est comme du bon pain noir, complet, «organique». On observe les irrégularités, les graines de céréales, les couches géologiques qui le constituent.

L’autoportrait de l’artiste est le format le plus modeste de tout l’accrochage, ce qui l’honore. Le quadragénaire nous fait face, en pied, ne cherche pas spécialement à se mettre en valeur, ses bras pendent le long du corps et ses mains semblent chercher les bords de la toile.

Le portrait de son amie est touchant car convaincant. La beauté de la jeune femme, considérée de profil, est évidente mais n’a rien d’éthéré. C’est un personnage comme on en croise quotidiennement, ici (à Paris) ou là (à Berlin). Le parti pris esthétique nous la rend plus proche encore. Certainement.

Liste des œuvres
— René Wirths, Schmetterling, 2009. Huile sur toile. 160 x 200 cm
— René Wirths, Hand, 2008. Huile sur toile. 182 x 182 cm
— René Wirths, Brotlalb, 2009. Huile sur toile. 120 x 120 cm
— René Wirths, Portrat, 2009. Huile sur toile. 155 x 185 cm

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