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La natura delle cose

La nouvelle pièce de Virgilio Sieni trouve sa source dans le poème de Lucrèce De natura rerum. Le philosophe et poète latin du premier siècle après J.C propose d’appréhender la perpétuelle mutation des formes de la nature et leur renouvellement. S’inspirant de ces conceptions, et grâce à une collaboration avec le dramaturge Giorgio Agamben, le chorégraphe transporte sur scène tant une vision onirique qu’un principe scientifique d’organisation du mouvement. Virgilio Sieni explore la circulation entre les corps — à travers des trajets ponctués de délicats ornements —, la manipulation du corps de l’autre et le déplacement d’un collectif devenu pièce unifiée, organisme unique, dans une fusion spontanée de la matière.

La force gracile et réjouissante de Daniele Ninarello, interprète féminine de la pièce, figure essentielle, entière, presque inconvenante, personnifiant Vénus sous trois incarnations, provoque une exaltation sincère.

Construite autour de ce personnage qui revêt tour à tour différents masques, incantations poétiques des trois âges de l’existence, la pièce propose un voyage à cœur ouvert dans l’imaginaire de la divinité et du féminin, allant au-delà des poncifs sur l’amour et la beauté. La danseuse apparaît sous l’effigie d’une femme suspendue, puis sous le masque d’un poupon, et revient sous l’apparence d’une vieille femme. Nous suivons l’évolution de cette créature, de métamorphoses en métamorphoses, bluffés par la transformation du corps dansant, en fonction de ces faciès.

Le corps parfois dense, d’autre fois désarticulé de la danseuse, la précision de la gestuelle et la qualité de présence/absence des hommes sont remarquables. L’écriture chorégraphique s’élabore dans une parfaite maîtrise de l’espace. La scénographie, constituée de grands rideaux blancs, donne naissance à un lieu calfeutré, intimiste. Zones de passage, fluctuations du réel, elle participe de l’univers éthéré de la création.

Dans un instant inattendu, une éminente main blanche vient parcourir la scène, telle la main du créateur. L’on s’interroge sur les interprétations possibles, d’un plaisant écho à la démarche de création artistique à une allégorie signifiant la nature divine de toutes choses.

— Chorégraphie, mise en scène: Virgilio Sieni
— Collaboration à la dramaturgie, traductions: Giorgio Agamben
— Interprétation: Ramona Caia, Massimiliano Barachini, Jacopo Jenna, Csaba Molnar, Daniele Ninarello
— Musiques originales: Francesco Giomi
— Voix: Nada Malanima
— Costumes: Geraldine Tayar
— Lumière: Marco Santambrogio
— Structures gonflables: Fly In Balloons s.r.l.
— Masques animaux: Chiara Occhini
— Prothèse, mécanismes, automations: Giovanna Amoroso, Istvan Zimmermann-Plastikart