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Joseph Marioni

PPierre-Évariste Douaire
@12 Jan 2008

Six tableaux presque monochromes présentent un prisme de couleurs semblable à celui d’un arc-en-ciel. Le tout ressemble à un dispositif chromatique. Les tableaux abstraits sont autonomes mais l’accrochage fonctionne tellement bien que l’on croirait à une installation.

Avec certaines galeries on sait ce que l’on va trouver. Chez certaines des valeurs sûres, chez d’autres de nouveaux talents. Chez Xippas, il s’agit toujours d’une peinture élégante, sophistiquée flirtant avec l’abstraction. La peinture de Joseph Marioni oscille entre une recherche formelle de puriste et une physionomie décorative. Elle oscille entre un ascétisme rigoriste et une facture très accessible.

La simplicité des toiles saute aux yeux. Six acryliques, presque monochromes, sont accrochées dans le plus petit espace de la galerie, dont l’alchimie se prête bien aux combinaisons. Les œuvres se parlent bien, se répondent bien. Net et sans bavures, l’endroit est charmant. C’est dans cette très grande clarté que les six couleurs vous sautent au visage. Il y a des tableaux à dominante violette, bleue, jaune, rouge, orange et verte. Il est facile de leur donner un titre ce sont Violet Painting, Blue Painting, Yellow Painting, Red Painting, Orange Painting et Green Painting.

L’ensemble ressemble à un exercice de style. La peinture réjouissante illumine autant que la lumière naturelle du jour passant à travers la toiture. La luminosité inonde les murs, elle semble déborder des coins inférieurs des toiles. C’est justement ces parties qui échappent à l’entière recouvrement des six couleurs. Ces bords ne sont pas entièrement peints, ils laissent percevoir une toile brute et vierge ainsi que d’autres couches de couleurs. La peinture acrylique s’offre un soupçon de liberté, elle se laisse couler dans un filet que le hasard contrôle.

Les six monochromes se présentent comme des blocs. Les uns à côtés des autres, ils offrent la vision d’un arc-en-ciel ou celle d’une boîte de crayons de couleurs. Entre présentation et installation, les toiles fonctionnent séparément, mais forment aussi un tout plaisant de contempler.
La vision panoramique procure pour l’œil un plaisir comparable à des friandises. La vue d’ensemble permet de passer de l’un à l’autre. L’ordre semble être respecté, presque voulu. On soupçonne le peintre de s’être fait violence et d’avoir laissé dans son atelier des Mangenta Painting, et ces autres Blue Cobalt Painting, pour n’offrir qu’un dispositif optique opportuniste. La série doit-être beaucoup plus longue, mais la disposition de la salle a imposé un accrochage privilégiant les mises en rapport plutôt que la quantité.

Avec ce type de composition deux solutions s’offrent au spectateur: il s’arrête pendant de longues minutes, ou bien il passe son chemin très vite. En balayant d’un seul geste l’ensemble du mur, tout a été vu et pourtant rien n’a été dévoilé. Il faut rester très longtemps devant chaque composition pour se laisser emporter par cette peinture en forme de miroir. On peut s’accrocher à elle ou-bien glisser dessus. Les deux attitudes sont possibles.

Ce genre de tableaux sont fait pour être accrochés chez soi. Il faut pouvoir vivre avec eux pour en percer l’énigme. Immédiatement reconnaissables, mais difficilement approchables, ils ne se laissent pas facilement mettre à jour. C’est en vivant avec eux qu’ils pourront se découvrir, non pas parce qu’on les aura regardés plus longtemps que quiconque, mais parce qu’on les aura vu évoluer dans des lumières et des saisons différentes.

Joseph Marioni
— Violet Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 56 x 46 cm.
— Blue Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 61 x 51 cm.
— Green Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 85 x 90 cm.
— Yellow Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 72 x 68 cm.
— Orange Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 91 x 87 cm.
— Red Painting, 2005. Acrylique et lin sur toile. 82 x 67 cm.

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