ART | CRITIQUE

John Baldessari

PMuriel Denet
@12 Jan 2008

Iconoclastes et débridées, ces œuvres de John Baldessari sont imprégnées de la scène artistique californienne des années quatre-vingt. Loin de la rigueur théorique new yorkaise, se mêlent sans retenue le quotidien le plus trivial et la fiction. L’art et la vie, version Hollywood.

L’an passé, John Baldessari présentait chez Marian Goodman des œuvres toutes récentes. Enchâssés dans d’épais cadres de grand format, des photogrammes extraits de films de série B étaient partiellement oblitérés par des polygones, nets et acérés, d’un jaune aveuglant.
Cette esthétique, mi-pop mi-conceptuelle, qui hausse l’imagerie populaire au rang d’œuvre quasi monumentale, en la minant de l’intérieur pour l’ouvrir à d’autres horizons, était déjà à l’œuvre dans les années quatre-vingt. En témoigne l’exposition de ce mois-ci.

Les formes variées des quelques assemblages — par juxtaposition, imbrication, ou encore en triptyque — qui sont aux murs, évacuent toute idée de système. Et ce malgré le recours récurrent, dans ces années, de la pastille qui masque les visages, désindividualise les personnages et les libère de tout pathos.

Les aplats de couleur, plus ou moins opaques, plus ou moins lisses et nets, quand ils ne font pas intrusion sans raison apparente dans l’image, en oblitèrent déjà des motifs, principaux ou secondaires (poules picorant dans une basse-cour, ou couple attablé chez un traiteur), ce qui en réactive d’autres (face rubiconde d’un charcutier, ou faces aveugles d’une planche de police pour portrait-robot). Les associations d’images, hétérogènes par leur origine (cinéma, magazine, album de photo) et leur texture (tirages argentiques ou impression grossièrement tramée), pervertissent les codes qui sont sensés les régir, les détourne, avec humour, de leur sens initial. De micro scénarii naissent, balbutiants et mineurs.

Iconoclaste et débridé, cet échantillon des années quatre-vingt fait écho à l’exposition que le Centre Pompidou consacre à la scène artistique californienne de cette période.
On y retrouve, si loin de la rigueur théorique new yorkaise, cette propension de l’art de la côte ouest à se mêler, sans retenue, de quotidien le plus trivial, et de fiction. L’art et la vie, version Hollywood.

English translation : Margot Ross
Traducciòn española : Maite Diaz Gonzalez

John Baldessari
— Cutting Ribb on, Man in Wheelchair, Paintings (version #2), 1988. Photographie noir et blanc et peinture acrylique sur panneaux. 194,31 x 91, 44 cm.
— Waterfall With Two Men, 1984. Photographie noir et blanc, huile et acetate. 134,62 x 111,76 cm.
— Figure (Green) with side of Beef/Two Figures (Grey) with Food, 1990. Photographies couleur, teinte à l’huile et peinture vinyl sur panneaux. 191,14 x 219,71 cm.
— Two Faces: Three Figures; One Shadow (version #2), 1988. Photographie noir et blanc et peinture acrylique sur panneaux. 123,19 x 77,47 cm.
— Fish/Chickens/Two Birds, 1990. Photographie noir et blanc, photographies couleur et peinture acrylique sur panneaux. 132,08 x 325,12 cm.
— Two Relationships Early (Warm)/Late (Cool) with one Risky., 1982. Photographie noir et blanc et peinture acrylique sur panneaux. 119,70 x 62,23 cm.
— Raft and Two Divers (with YeIIow Intrusion), 1990. Photographies couleur teinte à l’huile et peinture acrylique sur panneaux. 160,66 x 196,22 x 2,54cm.
— Large Object (Orange) in Water and Blue Moon, 1991. Photographies couleur et peinture acrylique . 121,92 x 76,84 cm.
— Large Glass (Orange) : And Person, 2004. Impression numérique, peinture acrylique sur panneaux en mousse.
— Person on Bed (Blue) : With Large Shadow (Orange) and Lamp (Green), 2004. Impression numérique, peinture acrylique sur panneaux en mousse. Publications

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