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Jérôme Rappanello

PMathilde Villeneuve
@12 Jan 2008

Présentation du travail de l’artiste dans son appartement après avoir conçu une quarantaine d’expositions pour ses confrères. Photos, vidéos et diaporama reflètent le décor brut et simple qui les accueille. Ils témoignent du désordre intérieur, et enregistrent les évènements qui s’y produisent.

Le petit appartement de Jérôme Rappanello, constitué de 2 pièces et d’une cuisine, se prête à un accrochage simple mais efficace où les œuvres épousent d’autant plus l’espace qu’elles sont ici créées et agencées par le locataire lui-même.

En puisant dans des références et des mondes hétéroclites, l’artiste crée sa propre trajectoire artistique. Intéressé à la fois par l’esthétique de la pin-up, du tatouage et de la peinture, il réalise un diaporama dans lequel des toiles romantiques ou académiques sont projetées sur son épaule. Le nu féminin (motif récurrent des tableaux classiques comme des tatouages d’aujourd’hui) apparaît de manière systématique et sert d’élément de jonction entre les différents univers.

Ailleurs, l’histoire de l’art n’est qu’un élément déclencheur du travail. La série intitulée « Le Musée imaginaire », composée de photos en noir et blanc de miroirs ovales, témoigne d’une bonne connaissance de l’art du XXe siècle.
Le Surréalisme apparaît dans la reprise de figures telles que l’ovule entouré de spermatozoïdes disposés en forme de soleil, le Symbolisme d’Yves Klein dans les empreintes de mains.
Par delà ces influences, l’œuvre vient troubler: s’agit-il de peintures appliquées à même la glace ou de projections de dessins dans le miroir?
En fait, pour abolir toute trace d’original, les dessins initiaux sont supprimés. Le dessin et la photo se confondent ici, sans privilégier un médium à un autre. En photographiant le reflet de la forme plutôt que l’original, l’artiste met la forme en abyme. Au mur sont présentés des polaroïds montrant des amis vus de dos, leur visage apparaissant dans le miroir de leur salle de bain. Dans un décor habituellement réservé à la toilette et à la nudité, les hommes et femmes se mettent en scène.
Deux photos juxtaposées représentent chacun des membres d’un couple tenant chacun un miroir où se reflète le visage de l’autre, poussent la notion de reflet à son paroxysme et suggère l’idée de fusion ou de confusion. Le titre de l’œuvre Palindromes désigne un mot qui peut être dans deux sens en conservant la même signification.

Ainsi dans Entropie quotidienne, Jérôme Rappanello applique au quotidien la théorie scientifique qui postule la tendance au désordre de tout système.
Des photocopies couleurs de photos d’objets sales ou cassés sont des enregistrements spontanés du désordre ambiant. Accrochées au mur de la cuisine, elles sont la trace de ce qui est advenu et la menace de ce qui pourrait encore venir perturber l’apparence tranquille et ordonnée du lieu.

La vidéo Cuisine d’atelier l’artiste mélange dans une casserole de la peinture noire et blanche avec une cuillère en bois. Illustrant ainsi l’expression « cuisine du peintre » par le geste. Enfin, à force d’entendre ses amis artistes dire qu’ils aimeraient travailler sur les immeubles d’en face de sa fenêtre, Jérôme Rappanello décide de le faire : un triptyque de photos couleurs des vues de sa chambre confronte les géométries et les contrastes, l’intérieur et l’extérieur.
Jérôme Rappanello ne suit pas de ligne directrice mais visite des univers proches ou de l’histoire de l’art, des mots ou des espaces habités par d’autres.
Artiste sans prétention, il pratique même l’autodérision dans une vidéo où il est habillé en jeune-homme sage en train de rouler un pétard sur fond musical de Massive Attack. Tournée en un plan obstinément fixe, la scène qui s’étire lentement suscite l’ennui. Le jeune de la vidéo, jambes croisées et l’oeil insolent, mime l’indolence et la gentille défonce.

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