DANSE | SPECTACLE

Montpellier Danse | The Quiet

28 Juin - 29 Juin 2019

Avec The Quiet, le chorégraphe Jefta van Dinther livre une pièce traversée par le temps, son épaisseur, et la nécessaire transmission intergénérationnelle. Interprété par cinq danseuses, The Quiet met au jour la fine et fragile ligne qui sépare quotidien et éternité.

Pièce douce et profonde, The Quiet (2019) du chorégraphe néerlando-suédois Jefta van Dinther réunit cinq danseuses. Cinq femmes lentes et mouvantes, dans leurs gestes quotidiens. Silencieuses, pour autant la pièce ne l’est pas. Éparses, des voix racontent. Sur scène, dans la semi-pénombre, une femme est abordée par une autre. Lentement elle lui dit, mimant la voix enregistrée qui énonce : ‘Nous allons te raconter des choses, et bientôt ce sera comme si tu les avais toujours sues.’ Tout est lent, mesuré, posé. La femme écoute, se détourne un peu, semble hésiter. Une autre femme arrive, lui parle avec une autre voix, masculine : ‘Plus nous raconterons, plus cela deviendra réel.’ Sont-ce là les voix du destin ? De ces figures mythiques qui filent, font et défont les vies ? Une autre femme approche, poursuit le récit entamé : ‘Les gens pensent que tu es silencieuse, mais tu ne l’es pas.’

The Quiet de Jefta van Dinther : éloge de la lenteur et de la profondeur

Alternant mouvements, voix, paysages sonores (comme des pas dans la neige) et gouttes de piano (Falling Ashes de Slowdive), The Quiet déploie une poétique de l’expérience. Les femmes qui peuplent l’espace scénique, même habillées pareil, sont de générations différentes. Et quelque chose se joue de la transmission. De celle qui rattrape et interroge. Pas d’esclandre, pas de cri, pas de surgissement survolté. C’est dans la lenteur du questionnement et de la répétition des gestes que The Quiet érode et corrode les certitudes. Calmement, dans la fêlure du présent, la danse distille quelque chose d’atemporel. La scène est sobrement apprêtée, dans une demi-obscurité qui resserre l’espace autour d’un foyer. Comme si quelque vérité éternelle allait se dévoiler au coin du feu. Les gestes sont mesurés, ou plutôt chargés. Chaque femme, dans chaque pas, semblant porter avec elle le corps et les souvenirs de milliers d’autres femmes.

La transmission intergénérationnelle : une danse sur le fil, entre quotidien et éternité

Interprété par Linda Adami, Alexandra Campbell, Lisa Drake, Cecilia Roos, Agnieszka Dlugoszewska et Kristine Slettevold, The Quiet passe par la récitation, le chant et les prières pour faire affleurer quelque chose de ce qui se transmet de génération en génération. La tradition des gestes et la tradition orale sont ici deux vecteurs aussi puissants que les récits historiques. Hors de tout contexte sinon celui du présent pur, en train de se dérouler, The Quiet met au jour une force à la fois discrète et comme immuable. Par delà les âges : une force qui modèle et module les corps, les gestes, les voix. Comme la marée, perpétuelle dans sa puissance d’organisation et de destruction. Moment de souffle dans le tumulte, The Quiet souligne ainsi une autre dynamique que celle du buzz. Et à l’écart des bulles vite consommées vite oubliées, la pièce déploie une temporalité qui invite à explorer d’autres émotions.

À retrouver en première française au festival Montpellier Danse 2019.

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