ART | CRITIQUE

James Hyde

PPhilippe Coubetergues
@12 Jan 2005

Une structure gonflable imposante, une sorte de coussin d’air géant maculé de peinture ; des images photographiées recouvertes de pans de couleurs monochromes jusqu’à en interdire la lisibilité. Une esthétique de l’obstruction.

James Hyde expose majoritairement des œuvres récentes (2002, 2003, 2004) sur les deux niveaux de la galerie des Filles du Calvaire. L’espace du rez-de-chaussée est envahi par une structure gonflable imposante, une sorte de coussin d’air géant maculé de peinture : Air Pillow (Transparent), 2002. Le visiteur est amené à en faire le tour sans parvenir à l’appréhender globalement avant d’accéder à l’étage pour le redécouvrir du dessus cette fois, à partir de la mezzanine. Découverte en deux temps donc, d’un objet énigmatique, une sorte d’air bag peint (quelle chute serait-il sensé amortir ?) qui instaure une véritable obstruction de l’espace.
Le lieu s’en trouve ainsi perturbé, transformé, remodelé ; l’espace est également ré-objectivé dans sa fonction d’exposition, le carré percé du plancher de l’étage venant encadrer horizontalement la peinture « gonflée » du rez-de-chaussée.

Sur les cimaises de l’étage, un ensemble d’œuvres qui associent l’impression jet d’encre d’images photographiées et la peinture acrylique. Des pans de couleurs monochromes recouvrent l’image, interdisent sa lisibilité. Des écrans de couleurs découpées qui viennent barrer l’accès à la représentation.
Le geste est rudimentaire comme provisoire. Des écrans de papier « scotchés à l’image » comme à la vitre d’une devanture de magasin « vitrine en cours ». Le regard est reporté à plus tard, détourné, dévié. Face au chantier de la peinture, il doit suivre une autre voie, prendre une tangente qui se maintient entre le signe et l’objet, accepter que soit maintenu ce cap indécis de l’œuvre, cette direction inconsolable du tableau (celle de la flèche blanche mi-peinte, mi-reflétée de Way ?).

Il s’agit encore une fois d’obstruction. Certes formalisée, canalisée, orientée, composée comme le sont invariablement les procédures d’agencement pictural. Ce qui n’est pas dissimulé s’en trouve révélé. Ce qui n’apparaît plus concède à ce qui reste une certaine puissance d’évocation renforcée par les masques colorés de substitution.

Mais ces jeux de montré/caché de l’image n’ont aucun intérêt. L’indigence revendiquée du motif le confirme ; l’image s’impose comme un matériau iconique propre à mettre en valeur la peinture plutôt que l’inverse. Non, décidément, plus qu’une quelconque victoire figurative, ce qui compte pour le peintre, c’est son empêchement. Il n’a d’ailleurs de cesse de multiplier les matérialisations dérisoires de cet obstacle qu’il ne cherche pas à surmonter.

A l’image de cette vaine perspective de la peinture et tout en rappelant significativement les pratiques de démantèlement explorées par Supports-Surfaces, Transit 2001, un simple écheveau de sangles de nylon coloré et entremêlées qui tentent de se maintenir à l’équerre comme une vraie grille orthogonale, apparaît ici comme un lamentable trophée, plus convaincant encore.

James Hyde
— Air Pillow (Transparent), 2002. Peinture acrylique sur toile de jute et vinyl transparent. 560 x 475 x 275 cm. — Cosmic Pillow, 2002. Peinture, toile de lin, plastique, ventilateur, bois. 9 x 12 x 4,80 m.
— Light Cube, 2002. Plexiglas, lumière. 76 x 76 x 88 cm.
— Sheet Steel Chair, 1998. Acier galvanisé, carpette en coton. 53,3 x 50,8 x 58,4 cm.
— Coffee Glow Table, 1998. Acier galvanisé, plexiglas. 114,3 x 61 x 35,5 cm.
— Igy, Pandora, 2003. Impression jet d’encre. 33 x 37 cm.
— Pandora, 2003. Aluminium et vernis.
— Kayak, 2003. Impression jet d’encre. 91,5 x 115 cm.
— Way, 2004. Aluminium, bois, peinture acrylique. 57 x 124 cm.
— Melt, 2004. Acrylique sur impression jet d’encre. 50 x 64 cm.
— Brown Mcd, 2003. Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 91,5 x 115 cm.
— Chevron Ivry, 2004, Acrylique sur impression jet d’encre. 63,5 x 49,5 cm.
— Mount, 2004. Fresque sur ciment et polystyrène. 88 x 60 x 73 cm.
— Ivry Table, 2003. Acrylique sur impression jet d’encre. 40 x 33,5 cm.
— Blue Blue Ball, 2004. Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 91,5 x 115 cm.
— Silas’s Pop, 2004, Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 963,5 x 49,5 cm.
— Tagged School, 2004. Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 963,5 x 49,5 cm.
— Pink Road, 2004. Acrylique sur impression jet d’encre. 963,5 x 49,5 cm.
— Wall, 2004. Bois sur vinyl transparent. 105 x 74 cm.
— Plow, 2004, Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 33 x 40 cm.
— Ivry Ceiling, 2004. Acrylique sur papier et impression jet d’encre. 33 x 37,5 cm.
— Splash Hats, 2004. Acrylique sur impression jet d’encre. 39,5 x 33, 5 cm.
— Transit, 2001. Sangles en nylon. 254 x 254 cm.

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