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Jacques Villeglé

Avec ses affiches lacérées, Jacques Villeglé, initiateur du Nouveau Réalisme, introduit la rue dans le musée, proposant une nouvelle peinture d’histoire.

Information

Présentation

Gérard Durozoi

Jacques Villeglé

Né en 1926 à Quimper, Jacques Villeglé n’a connu, en fait de formation artistique (en peinture et architecture), que celle dispensée en une période où les informations sur l’art moderne étaient presque inexistantes.

En 1949, il décide de se consacrer à la collecte d’affiches lacérées. Ce choix déroutant, qui oriente définitivement son œuvre, le situe à l’écart des débats qui, à l’époque, commencent à opposer les artistes de la figuration et les partisans de l’abstraction : tous sont également récusés comme attachés à un « fait main » avec lequel Villeglé veut en finir. Pour sa part, il lui suffit de ravir ce que les passants ont déjà fait. Cet intérêt pour certains aspects du paysage urbain et du réel quotidien fait de Jacques Villeglé l’initiateur, avec son complice Raymond Hains, de ce que Pierre Restany officialise en 1960 sous l’appellation de «Nouveau réalisme».

Les affiches lacérées, intitulées selon le lieu et la date de leur prélèvement, témoignent de l’irrespect du public pour la propagande commerciale et politique. Mais l’œuvre négatrice du Lacéré Anonyme dont Jacques Villeglé s’institue le conservateur révèle l’histoire sociale – des techniques publicitaires, mais aussi des mentalités, des usages et des conflits. Elle change en même temps que son matériau, et constitue une nouvelle peinture d’histoire(s), domaine où s’entrechoquent images, mots et couleurs, qui produisent sans préméditation des métamorphoses authentiquement plastiques.

A partir de 1969, Jacques Villeglé, en complément aux affiches, élabore des écritures sociopolitiques avec un alphabet recueilli dans les graffiti contradictoires tracés sur les murs, résultant comme les lacérations d’une créativité collective.

Introduisant la rue dans le musée, Jacques Villeglé rappelle qu’au-delà des cimaises, le monde existe avec ses cris, ses fureurs, ses jouissances et la somme mouvante de ses conflits. Sa beauté imprévue se révèle, non par sa transposition «artistique» mais par le regard que Villeglé invite à porter sur les fragments qu’il en recueille.

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