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It’s Not Funny

PFrédéric-Charles Baitinger
@12 Jan 2008

Contre la bêtise qui s’ignore s’élève le rire de l’idiot. Contre les excès d’un art «engagé» se tient le rêve d’une pensée légère. Et si le jeu n’était pas seulement l’apanage des enfants, mais le signe ironique d’une pensée sérieuse — qui fuit tout ce qui est lourd par profondeur ?

Les quatre artistes que réunit la galerie Pascal Vanhoecke ont un point commun : ils sont joueurs. Et comme tous ceux qui aiment jouer, ils se lassent vite de leurs rêves. Ils ébauchent des idées, commencent à les mettre en forme, puis les laissent inachevées — comme des jouets devenus hors d’usage.

Ils sont à l’image du personnage que présente la vidéo de Michaël Sellam. Ils courent, se démènent, fuient la monotonie mais ne peuvent s’empêcher de tomber. Mais peu leur importe ces chutes. L’instant d’après ils se relèvent — toujours plus innocents et joueurs. Rien ne semble pouvoir leur retirer leur entrain. L’oubli et le rire les emportent dans une folle course en avant.

A tout prendre, ils préfèrent regarder plutôt que d’être vus. Comme dans les oeuvres de Ronald Dagonnier et Frédéric Lecomte, ils retournent le poids de la représentation sur le spectateur qui les regardent. C’est à nous – voyeur – que le poids du visible incombe et non à eux – créateurs enfantins.

Par malice ils se dérobent et nous entraînent dans leur univers de fantasmes où tout ce qu’il y a de plus sacré se voit tourné en dérision. Erigées comme des verges promises au septième ciel, toutes les religions monothéistes se transforment en godemichés masturbés par la main profane de l’artiste.

Le corps de la femme, lui aussi, ne fait pas exception. Découpé à même des images publicitaires, il devient l’esclave de petites mécaniques ingénieuses qui le forcent à reproduire sottement des gestes sans contenu. Toute la force de l’érotisme s’y étiole à mesure que se répète maladroitement les formes les plus convenues de la séduction.

Mieux vaut alors renoncer à faire oeuvre et ne présenter que des miettes, des esquisses — des projets grandioses à jamais avortés. Ainsi s’étale devant nous une ébauche de satellite en bois avec sa peau de chewing gum. Ou bien l’auto fiction de Loïc Connanski mettant en scène son absence d’inspiration. Ici l’art sombre dans un immense éclat de rire !

Quel projet ! Réunir en une seule exposition ces quatre artistes frondeurs ! A elle seule, cette initiative est une gageure. Et pourtant, une vérité s’élève de cet impossible. Pour celui qui ne croit plus en la puissance positive de l’art, reste la force corrosive de la critique – qui a au moins le mérité de pointer du doigts les idoles sur lesquelles s’appuie notre monde. 

Ronald Dagonnier
— Même pas mal, 2007. Captation vidéo, incrustation 508 phobies
— Œil, Eau, Feu, Nuage, 2007. Rétro projection sur demi sphères, 2 min. 45
— In God We Trust, 2007. Cadre vidéo numérique – Boucle

Loïc Connanski
— Mon papa est curator, 2007. Installation, dessins de Félix Connanski.
— Un mur de possibilités, 2007. Installation, cartel dim variable
— Un mur d’impossibilités, 2007. Installation cartel dim variable
— Nice Paris Works, 2007. Vidéo, 12 min

Michaël Sellam
— Fugue, vidéo boucle, 2006
— Bubble, 2007. Installation, techniques mixtes dimension variable

Frédéric Lecomte
— Aerobiclub, 2002. Installation techniques mixtes dimension variable
— Sous les jupes des filles, 1995 . Installation avec balançoire
— Triangulation, 2000 . Vidéo + fil

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