ART | CRITIQUE

Il était deux fois

PMoïra Dalant
@20 Avr 2010

Entre maquette gigantesque et bateau miniature, l’œuvre de Vincent Olinet perd toute valeur d’utilité pour entrer dans la sphère de l’imaginaire et du fantastique conte de pirates. Twice Upon a Time se joue du conte de fée, qu’il détourne et rejoue version insolite et romanesque.

Quelles histoires Vincent Olinet nous conte-t-il? Celle d’un capitaine de navire géant et de son mini équipe? Celle d’une virée entre potes (le ravitaillement se résume à quelques paquets de biscuits apéritifs, des bouteilles d’Orangina) à bord d’une barque/galion ?

Twice Upon a Time/Il était deux fois
est une caravelle de 5 mètres de longueur et de hauteur, pas tout à fait à taille humaine, pas non plus un jouet. Elle prend tout l’espace de la galerie, et celui du rêve aussi, qu’elle fait grandir quand le visiteur en fait le tour, qu’il se penche aux hublots, visite la sculpture du regard.
Une entrée dans le monde des Enfants Perdus et du Captain Crochet, une promenade en enfance, ou dans les romans d’aventure d’Alexandre Dumas. Une tempête de récits aventureux se déchaîne autour de soi. Il suffit de regarder le trois-mâts, une sortie en mer se profile alors.

Il était deux fois
est un jeu sur le possible et l’impossible. Si «Il était une fois» est un conte merveilleux pour enfant, «Il était deux fois» deviendrait-il un conte hybride pour adulte, un récit de l’absurde?
La caravelle est à la fois réalité et sculpture. Construite en bois autoclave, elle peut résister à l’eau, assez grande pour porter des bébés mais trop petite pour supporter un adulte. Qui laisserait un bébé partir seul en mer…
L’œuvre oscille entre deux échelles, entre deux logiques, celle du rêve et celle du réel. Elle offre un voyage surprenant, possible seulement en soi-même, et célèbre les destinations solitaires.

Twice Upon a Time joue sur les changements brusques d’échelle, et place volontairement le regardeur en état de déséquilibre, ce qui le pousse à réajuster son regard, et son jugement.
Humour quand le visiteur remarque enfin que les lanternes de la maquette sont à l’échelle 1, trop grandes pour la nacelle elle-même. Décalage aussi lorsqu’il entreprend l’inventaire des marchandises contenues dans les tonneaux de bois du navire: rien de substantiel; un choix qui semble poser la question très personnelle de l’essentiel et du superflu.

Vincent Olinet revisite le réel pour offrir un univers insolite, très personnel. Je ne peux pas faire de miracles repense la nature morte Renaissance. Les objets traditionnels de la nature morte: bougies, grappes de raisin, pièce de boucher, sont plongés dans l’eau, éclairés d’une lumière hors champ et photographiés.
Deux univers sont confrontés, les fonds marins riches en inconnu et en aventures, et l’univers petit-bourgeois qu’illustraient vanités et natures mortes du XVIIIe siècle. Le sous-sol de la galerie semble offrir une vision sous-marine de l’histoire de l’art, et de l’univers romanesque qui environne la maquette de bateau.

Liste des oeuvres :
— Vincent Olinet, Twice Upon a Time/Il était deux fois, 2010. Bois, verre, lampes, cordes, bateau. 5 x 5 x 2 m (environ).
— Vincent Olinet, Je ne peux pas faire de miracles 3, 2007. C-Print sur papier Arche. 80 x 120 cm.
— Vincent Olinet, Je ne peux pas faire de miracles 4, 2008. C-Print sur papier Arche. 80 x 120 cm.
— Vincent Olinet, Je ne peux pas faire de miracles 5, 2008. C-Print sur papier Arche. 80 x120 cm.

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