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If I dig a very deep hole.

PMagali Lesauvage
@12 Jan 2008

Pour son expo de rentrée, la galerie gb agency, revendiquant toujours l’héritage conceptuel, invite l’artiste thaïlandais Pratchaya Phinthong, qui poursuit son étude des contingences et des corrélations entre l’art et la réalité.

Le travail de Pratchaya Phinthong consiste depuis quelques années en la mise en relation de deux réalités, qu’elles soient géographiques, sociales ou économiques. Ainsi, en 2005, l’artiste proposait pour l’exposition collective «Petites Séquences entre amis» chez gb agency, divers objets collectés ou créés lors d’un voyage qui l’avait mené de Francfort, ville où il étudiait l’art, à sa ville natale de Bangkok, et formant une sorte de journal. Ses projets sont «conçus à partir d’un dialogue entre l’artiste et les autres, faisant glisser le geste artistique dans le champ social».

L’exposition «If I Dig a Very Deep Hole» (Si je creuse un trou très profond), présentée actuellement, s’affirme comme un «autoportrait de l’artiste à Paris». L’œuvre éponyme est un ektachrome représentant deux fois la pleine lune ; éclairé par derrière, il est inséré dans le mur d’une pièce non éclairée de la galerie, à l’endroit le plus éloigné de la perception du visiteur.
La lune a d’abord été photographiée à un point exactement opposé à celui du Paris sur le globe, dans les îles Chatham de Nouvelle-Zélande, avant d’être photographiée à Paris même. De cette démarche fastidieuse aboutit un résultat formel discret, presque invisible, agissant en négatif par rapport à la seconde œuvre présentée.

A propos de son œuvre If I Dig a Very Deep Hole, Prachtaya Phintong affirme : «Il y a une tentative d’établir des différences au sein de similarités. Bien sûr si tu creuses un grand trou dans la Terre, il y aura juste ce trou et ce n’est pas ce qui m’intéresse. Ce qui m’intéresse, c’est de provoquer la pensée de ce trou et la possibilité mentale de déboucher de l’autre côté de la Terre».
Mais l’artiste a éprouvé l’expérience physique entre les deux points, car il dit avoir eu besoin d’expérimenter «ce qu’il y a de l’autre côté de la Terre», comme «ce qu’il y a de l’autre côté du mur». Ainsi interroge-t-il le processus photographique, et, par celui-ci, la question essentielle du temps : temps de la mise en œuvre artistique, temps cyclique de la lune, temps de pose, temps de la «circumnavigation» du voyageur, etc.

La seconde œuvre est un Self-portrait, consistant en une phrase peinte sur un mur d’une autre pièce, celle-ci fortement illuminée: «Please Don’t Tell My Mom I Smoke» apparaît comme un secret personnel partagé avec les spectateurs. Situé entre deux réalités, celle de sa mère et la sienne, le secret fait appel aux souvenirs de chacun.

Dans ces deux œuvres, Pratchaya Phinthong oppose l’intimité fortement révélée du secret, et la confidence de l’expérience du trajet entre les deux lunes : selon l’artiste, ces deux pièces, dont la résolution est «formellement très neutre», sont basées sur son «espace intérieur». Elles laissent au spectateur l’espace de la réflexion, un «espace à combler», selon Pratchaya Phinthong.

Pratchaya Phinthong
— Self- portrait, 2007. Peinture murale, 480 x 24 cm.
— If I dig a very deep hole…, 2007. Installation : mur, fluo, ektachrome inséré entre deux plaques de plexiglas. Dimensions variables.

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