ART | EXPO

Hors-jeux

18 Avr - 27 Juin 2009
Vernissage le 17 Avr 2009

Les oeuvres des seize artistes présentées ici nouent un dialogue sensible et inventif entre l’art et le sport, offrant au public une lecture éclairée des phénomènes sociaux et culturels qui caractérisent nos sociétés.

Communiqué de presse
Pip Culbert, Charles Fréger, Michèle Garrec, JD Hollingshead, Joey Kötting, Dominik Lejman, Arnaud Maguet, Olivier Millagou,
Trine Lise Nedreaas, Laurent Perbos, Annelise Ragno, Lionel Scoccimaro, Andres Serrano, Olivier Sévère, Salla Tykkä et Uri Tzaïg

Hors-jeux

Désignée en 2006 «Ville la plus sportive» par le journal L’Equipe, Beauvais est passionnée par le sport qu’elle valorise à travers un tissu associatif dense, de nombreuses infrastructures et équipements ainsi que l’organisation d’événements d’envergure nationale et internationale.

Prenant appui sur cette spécificité, la Direction des affaires culturelles a souhaité initier une rencontre originale entre les mondes de l’art et du sport qui, contrairement aux apparences, possèdent une foule de points communs, comme ceux de proposer un espace d’échange et de partage, une expérience et un apprentissage de la relation à l’autre.

Conçue par Clarisse Le Bas,chargée des expositions à la Collection Lambert en Avignon – Musée d’art contemporain -, et Gaïdig Lemarié, chargée de mission Arts plastiques pour la Ville, l’exposition « Hors-jeux » rassemble seize artistes, jeunes talents ou de renommée internationale, dont les oeuvres nouent un dialogue sensible et inventif entre ces deux univers, offrant au public une lecture éclairée des phénomènes sociaux et culturels qui caractérisent nos sociétés.

«Un sport est un geste, une règle, un enjeu», Alain Ehrenberg.
«Hors-jeu» est là règle n°11 qui stipule qu’au football un joueur est en infraction lorsque celui-ci ou une partie de son corps est plus près du but adverse qu’à la fois le ballon et l’avant dernier joueur de l’équipe opposante.

Cette exposition prend son origine dans l’omniprésence du sport dans nos sociétés modernes. Est-il nécessaire de rappeler que le journal le plus lu est L’Équipe, qu’il existe en France treize chaînes de télévision consacrées aux manifestations sportives et que les baskets et le jogging sont devenus les basiques des tenues vestimentaires citadines.

Le sport est donc partout, il forme un décor permanent dont les artistes s’emparent par réalisme, dérision, dénonciation ou métaphore de nos sociétés. Il existe une réelle perméabilité entre les objets du quotidien et la production artistique.

La règle n°11 fait écho aux pratiques de Laurent Perbos, Pip Culbert et Olivier Sévère qui puisent leur inspiration dans le foisonnement des équipements et des disciplines. L’inventivité permanente des techniques et des matériels fait du champ sportif un véritable index de formes et de matières. Les artistes se les approprient pour les mener en dehors du jeu, hors-contexte. Ces objets ne sont pas des readymade, ils sont transformés, détournés de leur fonction initiale.

La batte de baseball en verre d’Olivier Sévère devient par sa fragilité son antithèse, un objet à mettre sous les vitrines d’un collectionneur. Pip Culbert quant à elle, vide une voile de windsurf, ne conservant que les coutures et lui ôtant ainsi toute utilité en la ramenant à une structure géométrique vide.

Laurent Perbos soumet la table de ping-pong à une démarche sculpturale radicale et utilise le revêtement en caoutchouc destiné aux pistes d’athlétisme pour créer un jardin zen dans la cour de l’Espace culturel. De plus, avec son Ballon le plus long du monde, il intègre dans son travail une nouvelle notion quantitative et inhérente au sport, celle du record.

Dans Le Sport et les hommes, Roland Barthes nous rappelle que la question «Qu’est-ce que le sport ?» répond à une autre question «Qui est le meilleur ?». Le sport est depuis son origine basé sur la compétition et le dépassement de soi. Le portrait de la culturiste Yolanda d’Andres Serrano incarne cet état où le corps devient un matériau, un outil au service de la performance allant jusqu’à produire des formes hybrides et asexuées.

La notion de performance est également au coeur du travail de JD Hollingshead mais contrairement aux artistes du Body art qui poussaient à l’extrême leurs corps, ce dernier entretient avec l’effort physique, un rapport quotidien quasi thérapeutique. Fabriqués de manière artisanale, son banc de musculation et son tapis de course font coïncider la force, fruit de la relation entre l’homme et la machine, avec le processus de création, l’un ne pouvant exister sans l’autre.

De même, Michèle Garrec et sa vidéo Endurance, corde à sauter rappellent que la contrainte du corps à l’espace et la nécessité de résistance au temps sont communes à l’artiste et au sportif. L’aliénation sportive permet à chacun d’oublier sa condition, de devenir un autre. Les visages déformés par l’effort extrême de la vidéo de Trine Lise Nedreaas, deviennent une métaphore du sport comme catharsis de la violence ; «La victoire n’est jamais celle de l’homme sur un autre homme, mais de l’homme sur la résistance des choses, sur ce qui s’oppose à sa liberté».

Ces visages torturés de Trine Lise et les corps écorchés d’Andres Serrano montrent que là où la performance règne, le jeu s’efface : «sans résultat le sportif est hors-circuit », hors-jeu. Allant plus loin, Salla Tykkä reprend la figure emblématique du boxeur, incarnée ici par une jeune femme blessée mais combative, qui évoque la souffrance physique et psychologique, l’existence d’une lutte symbolique pour la vie.

Les systèmes sportifs reproduisant nos schémas de sociétés avec ses lois, sa hiérarchie, ses vainqueurs et ses perdants, l’exposition « Hors-jeux » aborde également la notion de règle et de punition.

Les visages radieux et conquérants des patineuses finlandaises de Charles Fréger qui posent dans les attitudes réglementées de «Winner Face» font office de propagande. Leurs sourires répondent à des codes, effectués à un moment précis de la remise des médailles. Dans la vidéo Infinity, Uri Tzaïg redéfinit les règles créant une situation de jeu inédite et déstabilisante où les équipes sont formées d’hommes et de femmes portant un même uniforme, sans présence d’arbitre, alors que le terrain lui-même est en perpétuelle évolution.

Les règles sont aussi mises à mal par ces nouvelles générations de surfeurs et skateboardeurs qui refusent d’adhérer aux conventions officielles. Partisans de la même culture de la glisse, le sport devient une philosophie, synonyme de liberté et d’une vie à contre courant. La performance de Joey Kötting évoque ainsi avec poésie une nouvelle forme de conquête alpine qui ne passe plus par la tentative de domination des sommets mais par un processus artistique décomplexé mettant le corps de l’artiste en harmonie avec les éléments naturels.

Olivier Millagou et Arnaud Maguet se jouent des clichés et des codes liés à cette culture autonome. Dans l’installation Surf Now, Apocalypse Later Redux, ils dénaturent les planches de surfs remplaçant les couleurs usuelles chatoyantes par un noir sévère et menaçant.

Ces planches réalisées pour une première exposition,ont fait l’objet d’un road movie puis ont été utilisées par des surfeurs professionnels sur la côte atlantique, rappelant la nature à la fois sculpturale et fonctionnelle de l’objet.

Lionel Scoccimaro emprunte quant lui à l’univers du skateboard avec la reproduction des baskets Vans et du banc public, investi par les skateurs pour l’éxécution de leurs figures aériennes. En reprenant gravés sur le banc, tous les logos des marques affiliées à l’univers de la glisse, il évoque aussi les enjeux économiques liés au domaine du sport. Comme le souligne Jean-Marc Huitorel, les slogans «Just do it» ou «Break the rules» deviennent de véritables devises pour ces sportifs qui s’approprient, au grand bonheur des marques, les logos comme signe d’appartenance à un groupe.

Le sport devient un outil de marketing et le geste sportif est monnayé. Mais les gestes sportifs restent les mêmes depuis des millénaires, les muscles se bandent, les corps s’étirent. Le corps humain a de tout temps été la base des recherches artistiques. La photographie et la vidéo ont permis d’obtenir un nouveau point de vue, une meilleure compréhension du corps en mouvement. Les célèbres études photographiques d’Eadweard Muybridge ont permis de décomposer les actions des sportifs.

D’autre part, la surmédiatisation a entraîné une grande visibilité des gestes, une esthétisation des images et a ainsi ouvert un nouveau champ d’investigation pour les artistes. Annelise Ragno chasse les images, scrute les athlètes et extrait de leurs gestuelles, des mouvements précis, répétés comme des enchaînements chorégraphiques interminables.

Par un jeu de cadrage, le gymnaste au cheval d’arçon semble tourner sur lui-même indéfiniment comme une toupie, et le va-et-vient vertical de la tête du pongiste semble mimer le rebond de la balle. Dominik Lejman se laisse quant à lui charmer par les patineurs du Rockfeller Center qui, telles de petites ombres fugaces projetées sur les murs, tournent et virent inlassablement.

Vernissage
Vendredi 17 avril 2009.
— 17h. Performance de JD Hollingshead au Collège Baumont (avenue Pierre Bérégovoy, Beauvais), en collaboration avec la section sportive du collège et le Club de Triathlon de Beauvais.
— 18h30. Inauguration de l’exposition Hors jeux, Espace culturel.
— 19h. Performance de JD Hollingshead,Espace culturel

Autour de l’exposition
Mardi 12 mai 2009 à 18h.
Visite commentée de l’exposition par Gaïdig Lemarié, chargée de mission Arts plastiques. Entrée libre
Renseignements au 03 44 06 36 00

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