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Hors d’œuvre : ordre et désordres de la nourriture

Catalogue d’exposition sur les rapports entretenus par les artistes avec la nourriture dans tous ses états: de la dénonciation du consumérisme à la joie du partage. Un passage en revue plus ou moins apétissant, étayé d’entretiens avec trois artistes emblématiques: Daniel Spoerri, Wim Delvoye et Jana Sterbak.

— Auteurs : Laurence Dreyfus, Maurice Fréchuret, Géraldine Girard-Fassier, Jonas Storsve
— Éditeurs : CapcMusée d’art contemporain, Bordeaux / Fage éditions, Lyon
— Année : 2004
— Format : 22 x 28 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 167
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-84975-020-4
— Prix : 38 €

Ordre et désordres de la nourriture
par Maurice Fréchuret (extrait, p. 7)

Rejetant avec détermination la situation qui tenait l’art séparé de la vie, de nombreux artistes de la modernité n’ont eu de répit de l’associer à elle et de tenter de recentrer la création dans le cours même de l’existence. Se fondant sur la critique radicale d’une société où le principe de la séparation généralisée était le garant de sa propre survie et celui de la réussite de son projet, les artistes du début du XXe siècle se sont plus à introduire dans l’art des éléments du quotidien, à traduire dans le champ de son expression les gestes les plus simples tenus jusqu’à présent dans un registre jugé inférieur à lui. La vie dans ce qu’elle avait de plus immédiat et de plus sensible semblait pouvoir à nouveau s’infiltrer dans la pratique des artistes ou, pour le moins, redevenir une référence importante pour la création. Le mouvement Dada engagea entièrement son action dans la nécessaire reconquête de l’existence et, par une pratique dont l’agressivité masquait ce qu’elle avait de constructif, travailla à réduire ce qui la séparait de l’art. Le dépassement d’une telle antinomie fut un des principaux combats des autres avant-gardes artistiques du XXe siècle et nourrit nombre de recherches. Ainsi les gestes et les actions les plus courants, ceux qui constituent la base de la vie humaine ou animale, devenaient objets d’attention pour les artistes qui voyaient en eux les moyens de remettre l’art à l’endroit, c’est-à-dire dans sa référence immédiate et permanente à la vie.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du CapcMusée d’art contemporain)