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Halle

P

Une entrée dans la représentation : aquarelles fortement colorées d’intérieurs en perspective, mais une perspective légèrement décalée pour personnaliser chaque point de vue. Le texte, en contrepoint de cette perception toute personnelle, est le discours devenu muet — mais néanmoins présent — qui accompagne la visite de l’œuvre par l’artiste.

— Auteurs : Thomas Huber, postface de Philippe Cuenat
— Éditeur : Frac Franche-Comté, Dole
— Année : 2002
— Format : 21 x 15 cm
— Illustrations : quelques, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 117
— Langues : français, allemand
— ISBN : 2-910595-04-8
— Prix : non précisé

Halle
par Thomas Huber (extrait, p. 7-8)

Je me suis souvent demandé pourquoi j’éprouve ce besoin de parler aux tableaux, de leur composer un discours. J’ai écrit à nombre de mes toiles, je me suis placé devant elles et ai raconté une histoire au public. J’ai réfléchi aux rapports du texte et de l’image. En fait, I’écriture et le langage semblent répondre à une attente d’explication sans pour autant la satisfaire complètement. Le langage ne saurait rattraper l’image. Il n’est pas possible de parler des images, des tableaux, mais on peut parler devant ou à côté d’eux. Quant à moi, je parle le plus volontiers en eux. De tels discours, conscients qu’ils sont de leur différence avec l’image, leur donnent paradoxalement un sens. De tels discours donnent l’occasion de s’adresser à eux ; dans leur brièveté ou leur prolixité, ils créent un espace, un laps de temps permettant d’observer le tableau. Ils peuvent aussi susciter un refus désespéré chez le spectateur qui n’a alors pas de souhait plus ardent que de voir l’allocution s’achever pour pouvoir enfin contempler le tableau en paix. Sans ce discours intempestif, il n’aurait jamais éprouvé le besoin ni de le regarder ni surtout de le regarder en paix.

J’ai suffisamment discouru devant des tableaux, devant mes tableaux pour savoir combien le public m’était reconnaissant de mes paroles. Si je n’avais rien dit, il n’aurait pas eu de raison de regarder la toile et il n’aurait pas eu le temps, pas assez de temps, pour la contempler.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du Frac Franche-Comté)

L’artiste
Thomas Huber est né en 1955 à Zürich, Suisse. Il vit et travaille à Mettmann, Allemagne.