DANSE | SPECTACLE

Ha ! Ha !

04 Mar - 06 Mar 2008

Chez Maguy Marin, le rire perd de sa joyeuse allégresse pour cristalliser les bassesses de l’homme, habitant les corps de spasmes ininterrompus et effrayants.

Maguy Marin

Ha ! Ha !

20h30, 7 danseurs, création

— Création de : Maguy Marin
— Costumes et réalisation des mannequins : Montserrat Casanova assistée de Chantal Cloupet
— Lumières : Gilbert Guillaumond
— Concepteur son : Antoine Garry en collaboration avec Ulises Alvarez, Teresa Cunha, Jordi Galí, Cathy Polo, Jeanne Vallauri, Vania Vaneau,Vincent Weber

S’il n’appartient qu’au propre de l’homme, le rire, reste un phénomène insaisissable. Il est cette « fantaisie comique » ainsi nommée par le philosophe Henri Bergson dans l’ouvrage qu’il lui consacre et qui s’attache au mystère de ses manifestations.
Ha! Ha ! selon Maguy Marin, s’en approche aussi en chorégraphiant sans aucun mouvement dansé, dans le pli où s’insinue l’énigme du rire. Les procédés de fabrication et les différentes façons dont le rire s’exprime, en particulier dans le spectacle vivant, sont au coeur de cette réflexion. La chorégraphe y décline son usage jusqu’à l’insupportable à partir d’une question : quelle est donc l’intention de la société quand elle rit ?

Sur scène, le métronome donne la mesure d’un étrange concert de gloussements, avec des flots hilarants qui secouent les danseurs assis de dos devant un pupitre éclairant leur partition. L’accumulation des mots, formules et sentences, de plus en plus vaines, vulgaires, racistes, sexistes, exprime sans fard une forme de réalité : celle qui se dissimule sous la revendication d’ un certain droit à s’amuser. Quand un fou rire se propage, une autre foule silencieuse, immobile, tapie dans l’ombre, se découvre sur le plateau. Une quarantaine de silhouettes vont s’effondrer une à une, sous les salves de rire. Abruptement soumise à cette déroute du et des sens qui règne sans partage dans l’espace commun, la plaisanterie a perdu toute possibilité de drôlerie, de sourire ou de légèreté. Elle est à
l’image des corps happés par le rire, pleinement occupée par un acte qui ne lui permet aucun autre affect. Elle est comme figée dans un rictus, devenue son propre masque qu’elle réfléchit au public comme le miroir grinçant de ses peurs et de ses démissions.

En résistance aux formes uniques et à l’indifférence, à la culture de l’immédiat, du banal et autres misères du sensible, Maguy Marin travaille avec la scansion et le savoir du rythme. Cherchant la précision à la mesure de l’intention, ce processus dynamique, continuellement ouvert à la contradiction et l’antagonisme maintient vivante la possibilité d’une transformation. L’espace et la durée, la mémoire pure et celle des habitudes sont au coeur de ses pièces qui opposent à la vie comme contrainte, la vie comme création.

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