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George Herms. Assemblages

L’artiste américain George Herms travaille depuis une cinquantaine d’années sur le mode de l’assemblage d’éléments hétéroclites, dans le but de créer des œuvres au fort impact visuel.

Information

  • @2007
  • 2.
  • \.€
  • E142
  • Zoui
  • 4français / anglais
  • }140 L - 210 H

Présentation
Sophie Dannenmüller
George Herms. Assemblages

Extrait du texte de Sophie Dannenmüller

« Peintre, collagiste, poète, vidéaste, performeur, photographe, imprimeur-éditeur, professeur d’art plastique, et à jamais beatnik dans l’âme, George Herms est surtout connu et reconnu comme le principal représentant de l’assemblage californien (California Assemblage). Apparu spontanément vers 1949-1950 à Los Angeles et à San Francisco, ce mouvement se cristallise, devient visible et identifiable en tant que tel au tournant des années 60. L’assemblage californien est donc à peu près contemporain du Nouveau Réalisme français et du Néo-Dadaïsme new-yorkais, qui s’étiolent en laissant place au Pop Art et au Minimalisme dans la deuxième moitié des années 60. En Californie en revanche, l’assemblage se perpétue notamment grâce à George Herms dont le nom en est désormais devenu le synonyme. En effet, depuis cinq décennies, George Herms n’a jamais cessé de produire des assemblages, c’est à dire des Å“uvres tridimensionnelles élaborées à partir de matériaux extra artistiques et d’objets de récupération dont la destination première n’était pas le domaine de l’art. […]

« La beauté est mon devoir» déclare Herms en détournant l’adage féminin suranné, sans néanmoins (s’)imposer de norme immuable. Au contraire, l’art de Herms tient au questionnement et à l’élargissement de la notion de beauté — pour l’artiste autant que pour le regardeur. Herms choisit de préférence des objets manufacturés abandonnés dont l’aspect défraîchi souligne la temporalité, tout en délaissant les matières synthétiques, trop nouvelles, trop inertes, qui portent mal les marques du vieillissement. Ce Californien de la troisième génération affectionne tout particulièrement les tons bruns du métal rouillé, du bois usé, du vieux papier, dans quoi il reconnaît les teintes familières des paysages du Sud-Ouest américain, des plateaux désertiques, du bassin de Los Angeles — avant que l’homme n’y apporte l’eau. Pour Herms, ces couleurs défient le temps dans la vie aussi bien que dans l’art. Il utilise telles quelles, sans tenter d’effacer leur valeur d’usage intrinsèque antérieure, des choses usées, patinées, corrodées et abîmées que d’autres ont dédaignées, jetées et oubliées. Mais au-delà de leur beauté plastique, l’artiste souhaite également partager avec le regardeur l’émotion de la découverte de ces remarquables chefs-d’œuvre façonnés par la vie, le temps et la nature et voués à la décomposition. Ce moment de révélation où, à l’instar de Schwitters dans les rues d’Hanovre, l’artiste voit la beauté dans ces rebuts qui «s’illuminent et prennent vie» s’ils sont «maniés avec amour».

À partir des débris de la société de consommation, l’assemblagiste reconstruit, procédant naturellement par addition, jamais par soustraction (comme le fait le sculpteur de marbre). Herms évite généralement de rompre le processus additif-créatif en enlevant ou en remplaçant un ou plusieurs éléments à la composition en progrès, travaillant instinctivement à l’instar d’un «peintre d’action» [action painter]. Aussi, lorsque la censure lui demande lors d’une exposition en 1962 de retirer le drapeau américain incorporé dans un assemblage jugé anti-patriotique (Macks, 1960, détruit), Herms refuse en rétorquant que cela reviendrait à supprimer le nez d’un beau visage. Toujours fidèle à lui-même, Herms persévère imperturbablement dans sa posture de tenace résistance. Quand l’expressionnisme abstrait domine l’art américain, il s’attache à réconcilier l’abstrait et l’objet. Aujourd’hui, alors que l’image virtuelle se substitue à la réalité, il persiste à construire, avec des choses parfaitement tangibles, des œuvres qui occupent concrètement l’espace. Ancré dans ses convictions, George Herms élabore des sculptures résolument subversives sous tous les angles. »