ART | CRITIQUE

Géométries irrationnelles

PLiv Taylor
@25 Mar 2008

Surfons sur la ligne. Pascal Dombis nous entraîne à relire son trajet élastique, depuis le trait jusqu’à la courbe, depuis le carré jusqu’au cercle. Avec cet impérieux désir de produire de la furie, de l’excès et pourquoi pas du baroque.

Surfons sur la ligne. Pascal Dombis nous entraîne à relire son trajet élastique, depuis le trait jusqu’à la courbe, depuis le carré jusqu’au cercle. Avec cet impérieux désir de produire de la furie, de l’excès et pourquoi pas du baroque.

Non pas un baroque tape-à-l’œil qui placerait la séduction au-dessus des intentions. Plutôt un baroque qui éprouve le regard, le perdant volontairement dans les nimbes du décor. Un baroque qui cherche à embrasser le spectateur et son entité physique. En brouillant ses repères spatiaux, en le rendant acteur de sa déambulation.

Pascal Dombis ne cherche pas la stupeur et l’effacement, au contraire. Si la ligne se déploie, c’est parce que le spectateur accompagne sa progression. Dans Spin, il se trouve confronté à une spirale infernale dont le vortex l’aspire et le rejette à la fois. Dans Géométries irrationnelles, une installation murale de plus de 20 mètres, la déstructuration de la ligne s’affiche au rythme de son propre parcours. Quant aux lignes colorées des vidéos du deuxième Géométries irrationnelles, elles s’affolent lorsqu’il active une corde située à proximité.

Dans cette symphonie graphique et colorée, la ligne n’est qu’un prétexte. Tout autant que les mots, les pictogrammes et les logotypes d’ailleurs, qui s’enjambent, se traversent, se télescopent et prolifèrent à la surface de plaques lenticulaires essaimées dans l’espace d’exposition.
Une profusion d’information extrême renforcée par le principe cinétique du lenticulaire qui fait se superposer des milliers d’images, toutes visibles par le simple déplacement du spectateur.

De l’excès donc, une forme de virus qui gangrènerait la vision jusqu’à empiéter sur l’espace mental. Et pourtant. A l’origine de cette hyperconcentration, la partition numérique de Pascal Dombis ne joue que deux accords.
Trait-courbe, cercle-carré, blanc-noir,  «Right-Wrong», comme une rémanence implicite de la pensée cloisonnée que sanctuarise notre société. Le mode binaire une fois réglée et étalonnée, l’artiste programme la faille pour ensuite laisser filer le hasard.

On pense bien entendu aux Surréalistes, aux contraintes jouissives que se fixaient les Oulipiens. On pense à ce battement d’ailes de papillon qui génère l’impitoyable ouragan. Et quand l’art s’applique à briser la belle ordonnance scientifique, on pense peut-être même à redécouvrir ce que pourrait bien vouloir dire la «fracture numérique»…

Pascal Dombis
— Géométries Irrationnelles, 2008. Installation vidéo. 400 x 300 cm (chaque écran)
— Google_RYBWK, 2008. Impression lenticulaire montée sur aluminium, 120 x 180 cm
— Géométries Irrationnelles, 2008. Impression lenticulaire montée sur aluminium. 120 x 180 cm
— Géométries Irrationnelles, 2008. Impression lenticulaire montée sur aluminium. 120 x 180 cm

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