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Geoffroy Mathieu. Geum Urbanum

Geoffroy Mathieu explore les possibilités de l’image photographique à basculer du statut de document vers le poétique. Geum Urbanum propose de rapprocher trois villes, Tanger, Marseille et Edimbourg, sous l’angle de leur rapport au végétal en interrogeant la relation entre le donné naturel et l’occupation urbaine.

Information

Présentation
Geoffroy Mathieu, Baptiste Lanaspeze
Geoffroy Mathieu. Geum Urbanum

Les travaux de Geoffroy Mathieu se placent dans les interstices des codes de la classification de la photographie contemporaine, sans rester figés dans un champ particulier. Ses recherches le mènent à explorer les possibilités de l’image photographique à basculer du statut de document vers le poétique.

Pour ce faire, il utilise différents moyens: l’épuration des formes et dessins qui composent l’image, des distances au réel qui varient mais qui sont récurrentes, une forte exigence pour que chaque image tienne seule aussi bien qu’au sein de sa série, la recherche d’accidents visuels ou de micro événements. Il s’agit avant tout de construire sur le long terme un regard particulier témoignant de son rapport au monde et sous-tendu des problématiques qui l’intéressent: le paysage, la ville, le corps, la Méditerranée, Marseille…

Geum Urbanum propose de rapprocher trois villes, Tanger, Marseille et Edimbourg, sous l’angle de leur rapport au végétal. Le photographe explore les espaces urbains et péri-urbains en considérant qu’en ville, on est toujours dans la nature.

«On peut penser que la ville fait monde et qu’elle nous place, nous autres humains, d’une certaine façon «hors du monde». Il y aurait un stade urbain de l’humanité; le citadin serait une homme arraché à sa condition naturelle — et parvenu à l’état de liberté. Cela rejoint le sentiment qu’en ville, «on n’est pas dans la nature».

Cette idée, tenue pour acquise par de nombreux penseurs de la ville, repose sur une théorie de l’exception humaine qui constitue une intéressante curiosité ethnologique de l’Occidental du XXe siècle, mais qui relève de la pure métaphysique. Cette idée ne nous aide pas à qualifier l’inscription de l’espace urbain dans la biosphère, ni à penser l’habitat d’Homo sapiens dans la perspective de l’habitat des quelques milliards d’espèces non humaines.
Car on peut tout aussi bien affirmer qu’en ville, on est toujours dans la nature. […]

La ville a muté, mais pas encore nos représentations et nos pratiques. Peut-on continuer de nommer péri-urbain (en référence au centre-ville) ce qui est en réalité simplement la ville contemporaine: ce réseau fait de continuités automobiles, de lotissements, de connexions énergétiques, d’alimentation en eau et en nourriture, de nœuds aéroportuaires, de zones, de parcs de loisir.

Le photographe a raison: c’est uniquement à cette échelle, en observant la ville depuis le centre jusqu’à ses confins, qu’on peut analyser correctement tout le spectre de ses interactions avec le sol, le végétal, la biosphère. Quitter le centre-ville, tracer son chemin, arpenter ces espaces en interrogeant la qualité de la relation entre le donné naturel et l’occupation humaine, c’est déjà une invitation à penser, à pratiquer, à construire la ville autrement.»
Baptiste Lanaspeze

Dessins de Stéphane Brisset et graphisme de Yann Linsart.