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Gabriel Jones

PMagali Lesauvage
@12 Jan 2008

La galerie Lacen expose le travail photographique étrange du Canadien Gabriel Jones. Ses images, basées sur la tension du rapport entre le personnage et le contexte, surprennent par leur ambiguïté narrative.

Après l’exposition des toiles énigmatiques de Jagna Ciuchta, Bertrand Grimont propose une nouvelle fois à la galerie Lacen le travail d’un artiste où la mise en œuvre formelle se révèle particulièrement exigeante quant au caractère indéfini de la narration. Titrées d’un simple mot, résumant un état d’âme (Lost), ou un sentiment (Lust, l’envie), les photographies du projet Somewhere On Time (2004-2006) de Gabriel Jones, dont on a pu voir cette année à la foire Show Off quelques exemples récents sur le stand de la galerie new-yorkaise Priska C. Juscha Fine Art, confrontent l’individu à son environnement, dans un rapport formel tout autant que réflexif.

En effet, l’évidence fait défaut dans les photographies de Gabriel Jones. Dans un certain nombre d’images de Somewhere On Time (intitulé lui-même indéfini), un unique personnage occupe le paysage, intégré à celui-ci dans un rapport architectural, presque orthonormé, à la manière d’un atlante ou d’une caryatide de l’architecture classique.
Ainsi en est-il de Registering ou de Cause, où le rythme équilibré de la composition, horizontales et verticales sagement alignées, dépend du caractère plus ou moins fluctuant du personnage au centre, qui dialogue ainsi avec l’environnement.

Incluses dans une nature plus ou moins vierge, elle-même close de murs la situant dans un contexte urbain, les figures de Gabriel Jones n’expriment aucun sentiment, et paraissent comme exclues du monde : seul l’appareil du photographe en a capté la présence (Lost). Cet effet est renforcé par des couleurs ternes, et une luminosité peu contrastée qui donnent aux images un aspect passé.

Dans des œuvres telles Explanation ou Changes, le personnage n’apparaît qu’au second coup d’œil, dissimulé derrière un imposant rocher, épousant la forme du paysage au point de s’y confondre. Falling, proposant une vision plus romantique, montre un homme, les pieds dans l’eau sur une triste grève, face aux éléments, et face à sa propre individualité.

L’artiste affirme aimer « raconter des histoires, mais les débuts seulement », et « préfère laisser le spectateur imaginer la suite ». Pour cela, il élude tout détail de la composition, et résout l’individu au rang de simple signe. Gabriel Jones incite ainsi le spectateur à développer sa propre trame narrative au sein de l’image, et laisse libre l’interprétation.

Gabriel Jones
— Falling, 2004. Tirage jet d’encre sur papier archive. 109 x 137 cm.
— Changes, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 107 x 125 cm.
— Lost, 2004. Tirage jet d’encre sur papier archive. 85 x 152 cm.
— Cause, 2006. tirage jet d’encre sur papier archive. 107 x 125 cm.
— Hope, 2004. Tirage jet d’encre sur papier archive. 127 x 93 cm.
— Reflection, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 107 x 122 cm.
— Close, 2004. Tirage jet d’encre sur papier archive.109 x 152 cm.
— Registering, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 63,5 x 135 cm.
— Knowledge, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 107 x 147 cm.
— Lust, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 102 x 150 cm.
— Explanation, 2006. Tirage jet d’encre sur papier archive. 107 x 135 cm.

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