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Forum culturel du Blanc-Mesnil : Communes images

02 Oct - 04 Déc 2004

Les images en tant que témoins d’une vie quotidienne, parfois intime, tout autant que mémoires collectives d’un groupe. Les artistes, peintres, photographes, dessinateurs, tentent de prendre de la distance vis à vis des stéréotypes pour donner une vision plus détaillée du monde. Avec Edouard Levé, Isabelle Levenez, Shelagh Keeley, Elsa Mazeau, Valérie Mréjen, Silvana Reggiardo, Dominique Schmit et Yves Tremorin.

«Communes images»
Forum culturel du Blanc-Mesnil

L’événement
Communiqué de presse (par Eric Joly)

Les images, qui jadis étaient rares, représentaient un véritable privilège et ne semblaient alors qu’au seul service des puissants de ce monde.
Depuis la fin du XIXe siècle et notamment grâce au développement de la photographie, de la télévision, ainsi que des autres médias, elles se sont répandues et démocratisées. Elles nous sont devenues familières et participent à la constitution d’une mémoire intime et collective en perpétuelle évolution. Qu’elles s’épanouissent sur les murs de nos cités, dans le secret des albums de famille ou qu’elle soient véhiculées par les mass médias, elles sont devenues banales, communes et incontournables. Elles constituent un flot ininterrompu dans lequel se noie notre conscience. Jour après jour leur trop plein se déverse dans nos rétines soumises, au risque d’éroder notre sens critique et de saturer notre esprit.

Les artistes de «Communes images» partagent l’amour de leur époque et une capacité certaine à prendre suffisamment de distance vis à vis des archétypes visuels préétablis et des stéréotypes. Par les stratégies que chacun d’eux emploie, ces plasticiens libèrent les images de leurs carcans univoques et nous incitent à regarder le monde non pas globalement, mais en détail. Que ce soit dans les reconstitutions photographiques d’Edouard Levé et d’Yves Trémorin, dans les portraits atypiques d’Elsa Mazeau et de Valérie Mréjen, dans l’approche sociologique et humoristique de la télévison de Silvana Reggiardo ou encore au travers de la grâce qui émane des dessins d’Isabelle Levenez, de Shelagh Keeley et de Dominique Schmit, chacune de ces œuvres si différentes soient-elles propose une autre vision de notre quotidien.
Pour cela, ces plasticiens puisent leur inspiration dans la mémoire collective ou individuelle, et parfois même au fond de leurs rêves. Leur art est intime et ce sont des petits morceaux de vie qu’ils souhaitent partager avec nous. Ainsi, sans drame ni démonstration spectaculaire mais avec acuité et souvent avec humour, ils nous invitent à porter autour de nous un nouveau regard sensible et réfléchi.

Les artistes

> Elsa Mazeau
Elsa Mazeau, née en 1974, vit et travaille à Paris. Elle est en résidence au Forum pour la saison 2004 / 2005.
Les cultures se diluent et se métissent, tandis que les modes de vie tendent à se standardiser. La nouvelle création d’Elsa Mazeau Costumes folkloriques interroge les notions que sont la tradition et le folklore par le biais de l’habillement.
La tradition fige dans le temps des rites et des modes de vie qui semblent aujourd’hui obsolètes, et qui pourtant ont constitué jadis nombre d’identités régionales. Le folklore, considéré souvent comme la caricature de cette tradition, représente pourtant un point de repère, une ultime résistance à l’uniformisation de nos modes de vie et à l’effacement progressif d’une mémoire identitaire. Les portraits décalés d’Elsa Mazeau, qui mettent en scène des hommes et des femmes d’origines étrangères ainsi que des immigrés de la seconde génération, participent à nous faire prendre conscience de l’évolution constante de notre pays et de sa population ; loin d’être une perte, ce métissage et ce partage de nos cultures ancestrales avec de nouveaux arrivants constitue une richesse sans cesse renouvelée.

> Valérie Mréjen
Valérie Mréjen, née en 1969, vit et travaille à Paris.
Valérie Mréjen, vidéaste et écrivain, propose un montage inédit d’anciennes pièces vidéos. Depuis plus de dix ans, son Å“uvre séduit par sa simplicité. À travers une série de vidéos en plans fixes, elle met en évidence l’utilisation de formules d’usage qui viennent brouiller la communication. Ces saynètes, qui ont en commun la répétition d’expressions toutes faites, pointent du doigt la perte de sens de notre langage quotidien. Elles nous renvoient avec humour à notre difficulté à raconter ou à énoncer nos sentiments à autrui. Souvent drôles, parfois cruels, ces petits morceaux de vie qui mettent en scènes des comédiens, nous incitent à prendre conscience de la nécessité à trouver un langage commun qui ne soit pas assujetti à l’économie de mots. La dernière pièce présentée dans l’exposition, «Ritratti» permet de découvrir une autre facette de la création de Valérie Mréjen, puisqu’il s’agit de témoignages d’italiens qui évoquent face à la caméra un petit miracle advenu dans leur vie quotidienne.

> Edouard Levé
Edouard Levé, né le 1er janvier 1965, vit et travaille à Paris.
Edouard Levé présente des photographies de trois séries différentes : Rêves, Rugby et Quotidien. Ce sont des reconstitutions dans lesquelles il met en scène, sur un fond neutre, ses amis ou ses connaissances. Ses modèles rejouent des scènes, soit inspirées par ses rêves (qu’il note méticuleusement à son réveil pour pouvoir les restituer), soit prélevées dans la presse sportive où il choisit des images stéréotypées, ou encore dans la presse quotidienne dans laquelle il prélève des images qui ont marqué l’actualité. Ce plasticien traite tous ses tableaux photographiques avec une égale distance et une même neutralité. Le résultat est troublant, car Edouard Levé parvient à crédibiliser des scènes imaginaires et à déréaliser des clichés d’actualité. Des images virtuelles ou réelles, il ne garde que la composition, aucun accessoire ou décor pour nous guider dans le décryptage de ces images. Les protagonistes semblent figés dans des chorégraphies mystérieuses, de même que les prises de vues banales deviennent énigmatiques et symboliques. Dès lors, pour les déchiffrer et en déduire le sens véritable, nous devons faire appel à notre mémoire ou à notre imagination. Ainsi, Edouard Levé démontre à quel point peut être fragile et limitée la perception d’une photographie, dès lors qu’elle est extraite de son contexte et privée de sa légende.

> Silvana Reggiardo
Silvana Reggiardo, née en 1967 à Rosario, Argentine, vit et travaille à Paris.
À l’occasion d’un reportage, Silvana Reggiardo rencontre Carmen qui vit dans une chambre de bonne depuis près de vingt ans, au milieu d’un amoncellement d’objets les plus divers. Alors qu’elle la photographie, une image envahie soudain tout l’espace de sa prise de vue : dans l’écran d’une télévision démesurée, au milieu de chatons en porcelaine, de réveils et de représentations religieuses, un œil est apparu.
C’est ainsi que la jeune artiste décide de s’engager dans un travail documentaire sur les télévisions dans leur contexte environnemental. Elle a toujours été fascinée par ces objets du quotidien qui, accumulés, entassés au fil des années, agissent comme autant de révélateurs d’une histoire humaine fugace, entr’aperçue. Or de tous ces objets, la télévision occupe une place à part. Eteinte, elle n’est qu’une chose parmi les autres. Allumée, elle éclaire d’un relief particulier l’univers familier dans lequel elle semblait se fondre.
Silvana Reggiardo a voulu photographier ces moments où les choses du quotidien, à la lumière des images diffusées par l’écran de télévision, semblent s’animer soudain pour acquérir une dimension nouvelle, inattendue et troublante. Le résultat s’apparente à une étude sociologique illustrée, teintée d’humour, et nous permet de prendre conscience de la place prépondérante qu’a pris ce média dans la vie quotidienne.

> Yves Trémorin
Yves Trémorin, né à Rennes en 1959, vit et travaille à Saint-Malo.
Travaillant par séries, Yves Trémorin cadre de très près son modèle pour le fixer d’un éclat de flash. Utilisant un format carré, une grande partie du sujet reste hors champ. Le résultat est à la frontière de la macrophotographie et offre la perception troublante de la réalité. Sa série Natures Mortes, présente un inventaire d’aliments, d’ustensiles de cuisine, d’objets et de corps comestibles en leur état d’usage ou de denrées périssables. Le modèle est clairement identifié (reste de sauce, poireaux, beurre entamé) comme piégé entre deux états: en phase de préparation, en phase de consommation. Ces vanités domestiques, crues à l’oeil et offertes au désir, sont saisies à la brûlure du flash qui profane les couleurs et diabolise les matières. Elles assouvissent en nous quelque chose qui veut manger, prendre et dévorer, enfreindre et connaître, prier ou mendier, tout en sachant que cela sera condamné.

> Isabelle Levenez
Isabelle Levenez, née en 1970 à Nantes, vit et travaille à Aubervilliers, Seine-Saint-Denis.
Outre son parcours artistique, Isabelle Levenez, jeune artiste formée à l’école des Beaux-Arts de Nantes et à l’Institut des Hautes Etudes de Pontus Hulten, est diplômée en thérapie et en psychopédagogie. Dans ses installations vidéos et dans ses dessins, elle travaille sur le mouvement, l’équilibre, le temps, le handicap physique et mental, interrogeant le corps comme un espace à découvrir et comme un moyen d’échange vital. Toute sa production (dessins, installations sonores et vidéos) parle de cette intimité avec son propre corps et du face à face avec le corps de l’autre. Dans une démarche entre vie et survie, entre esthétique et thérapeutique, dans sa motivation d’atteindre l’autre, poursuivant sa réflexion sur le mythe de l’androgyne elle emprunte aux manuels de secourisme leurs formes stéréotypées, les recolorant dans une sorte de géométrie existentielle (l’existence en tant que réalité vécue).

> Shelagh Keeley
Shelagh Keeley, née en 1954 à Oakville, Ontario, Canada, vit et travaille à New York.
Elle dénonce la rupture moderne entre corps et esprit. Elle réactive la conscience de notre corporalité, de son histoire culturelle et sociale. Dans une entreprise de fouille, de dissection et d’archéologie du corps – de ce qu’il contient, de ce qui l’enveloppe – elle organise les éléments choisis à la surface de grands dessins fragiles, à l’aide de graphite, de cire, d’encres, ou de photographies. Signes dispersés, ses dessins tentent de recréer les liens perdus entre l’ intérieur et l’extérieur de notre être, entre notre âme et notre chair.

> Dominique Schmit
Dominique Schmit (1947-2004). C’est la maîtrise technique qui saute immédiatement aux yeux lorsque l’on aborde les travaux de Dominique Schmit. C’est la maîtrise technique qui saute immédiatement aux yeux lorsque l’on aborde les travaux de Dominique Schmit. Le mode opératoire semble pourtant simple, une feuille, un crayon ou une mine de plomb, et une envie irrépressible de noircir un espace vierge.
Troublants par leur parenté avec la photographie, les dessins de cet artiste semblent explorer la richesse et la variété des possibilités qu’offre ce médium aujourd’hui injustement boudé par le monde de l’art contemporain. Dans une frise présentant vingt-quatre prouesses graphiques mises bouts à bouts pour ne former qu’un tableau cohérent, Dominique Schmit nous démontre qu’à l’heure de l’image numérique il est encore possible de surprendre l’Å“il et de mystifier notre esprit sans avoir recours à une machine. Les traits de Dominique Schmit, qu’ils griffent ou qu’ils caressent la feuille, surpassent la simple représentation mécanique. Entre ombres et lumières, il juxtapose des éléments issus de réalités diverses. Ils évoquent tours à tours l’histoire de l’art, et la vie quotidienne d’un homme qui a passé sa vie à observer et à transcrire ce qui l’entourait. Ses dessins oscillent entre surréalisme et hyperréalisme, deux mouvements artistiques qui semblent l’avoir inspiré tout au long de son existence. Il montre dans cette ultime Å“uvre que loin de rester prisonnier de ses références, il parcourt depuis longtemps un autre chemin, nous invitant muettement à laisser nos écrans de coté et à reprendre vaillamment nos crayons et nos pinceaux pour nous réapproprier le monde.
Cet artiste nous a quitté prématurément, c’est pourquoi cette exposition lui est dédiée.

Commissaire
Eric Joly

Infos pratiques
> Lieu
Forum culturel du Blanc-Mesnil
Galerie Christian Boltanski
1/5 place de la Libération. Blanc-Mesnil
Rer B, station Drancy puis bus 148 ou 346 – Arrêt Libération.
> Horaires
mercredi et samedi de 14h à 18h et accueil des groupes du mardi au vendredi de 10h à 17h sur réservation.
> Contact
T. 01 48 14 22 33
relations.publiques@forumculturel.asso.fr
www.forumculturel.asso.fr
> Entrée libre

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