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Forms

Avec Marcus Tomlinson, le corps féminin s’anime d’une plasticité nouvelle, onirique. La couleur maquille la nudité d’un hâle, tourmente l’épiderme de ses vaguelettes bleues, rouges, vertes, reflets d’une mer calme tâchée de soleil. Mouvante, la vérité des chairs et des formes s’estompe au profit d’une redéfinition mentale du sujet, d’une vision fantasmée fille de nos désirs.

Ici, un buste sans tête, un visage gommé ; ailleurs, une physionomie précaire, incertaine. Fragmenté, exposant ses lacunes, traversé d’ombres, le corps entre dans un processus de disparition. Déjà, dans ses précédentes photographies de mode, Marcus Tomlinson s’était amusé à dissoudre ses modèles féminins dans le paysage environnant, jouant des tons sur tons et des transparences.

Prêt à s’éclipser, le corps se déréalise, devient autre. Il s’invente un temps et un espace propre — celui de nos désirs, toujours. D’où une certaine proximité avec les photographies surréalistes de Man Ray, et plus tard de Lucien Clergue, qui dessinent une nouvelle cartographie corporelle à partir de jeux de lumières et de procédés techniques comme la solarisation, la surimpression et la fossilisation.
Dans le cas de Marcus Tomlinson, le tirage Duratrance sur papier électrique est responsable de cette présence aqueuse, de cette dérive vers l’imaginaire, de cette érotisation par l’étrange.

Mais la sensualité première des courbes féminines, magnifiées par des poses de vénus ingresques — déhanché à l’antique et bras replié derrière la nuque —, contraste avec la fixité des corps et la dureté des regards. Et certaines autres postures inaccoutumées, buste en avant, mains et pieds au sol évoquant une quadrupédie presque animale. Que fait ce couple, surpris dans ce qui pourrait être une étreinte et dont les regards semblent condamner notre effraction ?

Si les clichés provoquent l’inquiétude, c’est qu’ils nous confrontent à des situations inexpliquées, à des corps technologiques, pas tout à fait humains. Un mélange de charnel et de virtuel. Un érotisme fantastique, qui aurait pu pousser plus loin son côté sombre, délaisser Pierre Louÿs pour Bataille ou Buñuel, devenir impudique. Á moins que ce ne soit justement dans cette chaste ambiguïté que Marcus Tomlinson, encore lié à l’univers esthétisé de la mode, ne puise son inspiration.

Marcus Tomlinson
Form, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 170 x 120 cm
Coloured Form, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 170 x 120 cm
Outlook, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 120 x 85 cm
Figure in Colour, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique  120 x 85 cm
Girl on Moolight Table, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 170 x 120 cm
Light in the Dark, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 120 x 85 cm
Asha, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 120 x 85 cm
Resonance, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 85.5 x 85.5 cm
Figures Together, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 85.5 x 85.5 cm
Fade Into You, 2008. Photographie numérique  Tirage Duratrance sur papier électrique. 120 x 85 cm
Touch, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 85,5 x 85,5 cm
Figures Apart, 2008. Photographie numérique. Tirage Duratrance sur papier électrique. 170 x 120 cm
Formed I, 2008. Vidéo numérique, Blu-ray ( format haute définition ). 7 minutes
Formed I, 2008 « part 1 ». Vidéo numérique, Blu-ray ( format haute définition ). 1 minute