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Felten-Massinger

Deux artistes belges réunies pour un même projet : photographier via une caravane, transformée en camera obscura mobile. Le résultat : des clichés en couleurs, flous, où se devinent des corps fantômatiques. Une démarche expliquée par un texte et illustrée de 4 photos.

— Éditeur : Frac Basse-Normandie, Caen
— Collection : Profil d’une collection
— Année : 2001
— Format : 16 x 24,50 cm
— Illustrations : 4, en couleurs
— Pages : 32
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-911487-37-0
— Prix : non précisé

Felten-Massinger
par Eddy Devolder (extraits, p. )

Tout commence presque fortuitement à Namur un jour de juin 1988, lors d’une rencontre qui réunit des animateurs pratiquant différentes disciplines artistiques.
À l’époque, Christine Felten et Véronique Massinger se connaissent à peine.
Elles ont certes fréquenté la même école – mais à quelques années d’intervalle – et pratiquent toutes les deux la photographiemais avec des orientations fort différentes. Peu de points communs les réunit.
Lors de la rencontre à Namur, elles décident avec deux de leurs collègues de construire une grande camera obscura, un parallélépipède de bois, de 2 x 2 x 3 mètres doté d’une porte, une sorte de boîte géante, de « case » élémentaire où le visiteur peut se tenir debout et assister à la naissance d’une image à l’intérieur d’une chambre noire qu’elles installent dehors, au bord d’un lac où elles proposent aux visiteurs d’assister à un phénomène littéralement renversant.

À leurs yeux, la photographie, c’est d’abord une histoire d’optique, de lumière, de camera obscura qui renvoie à un phénomène naturel, vieux comme le monde.
Les Hindous de la ville de Hampi dans la province de Karnataka, au sud-est de l’Inde racontent que le sténopé est une invention de Ganesa, l’éléphant, le dieu de la réincarnation.

Stimulées par l’expérience à laquelle elles viennent d’être associées, curieuses des virtualités qui leur semblent offertes, Christine Felten et Véronique Massinger ont envie de poursuivre dans cette voie alors que leurs collègues n’y voient qu’un événement ponctuel, anecdotique.

Elles vont jeter les bases d’un certain rapport de travail, se découvrir des complémentarités. Elles créent un espace duel, un lieu d’échange où elles confrontent leurs points de vue et instaurent une forme de dialogue, de complicité bref une base de travail qui fonctionne depuis comme cadre, comme « englobant » de leur entreprise.

Les images qu’elles réalisent ne sont pas par conséquent l’expression d’une concordance parfaite, d’une vision en tout point identique mais la rencontre, le croisement de deux regards qui à l’instar des musiciens de jazz en train d’improviser se rendent compte qu’ils ne jouent pas la musique de l’un ou de l’autre mais celle d’un tiers, Une autre métaphore s’impose ici, celle de la course relais, du passage de témoin qui leur permet d’accomplir ce qu’elles seraient incapables d’atteindre seules : voir la totalité du visible.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du Frac Basse-Normandie)

L’auteur
Eddy Devolder est né à Bruxelles en 1952. Son activité se partage entre l’écriture, le journalisme et l’enseignement de la littérature à l’Académie des Beaux-Arts de Tournai et à La Cambre. Il réalise également des peintures-dessins, travaux autour de l’écriture.