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Fables du doute

PMaxime Thieffine
@04 Juil 2008

Après «Visions nocturnes», l’exposition «Fables du doute» continue de creuser le sillon de l’irrationnel. Initié par la commissaire Simone Menegoi, elle s’inspire des découvertes scientifiques et des expériences para-scientifiques du XIXe siècle.

«Fables du doute» ressemble à un panorama partiel d’inventions et de dispositifs expérimentaux imaginés par des créateurs marginaux et le plus souvent amateurs, que les artistes reprennent plus ou moins fidèlement.
Christian Frosi propose deux  reconstructions approximatives»:  Ricostruzione approssimativa di un manifesto spazialista per la television, trasmesso il 17 maggio 1952 dalla Rai di Milano ainsi que Ricostruzione approssimativa di un esperimento di levitazione elettrostatica.
La première est la reprise d’un programme télévisé expérimental de l’artiste italien Lucio Fontana diffusé le 17 mai 1952, qui consistait à matérialiser sur l’écran des phénomènes immatériels.

La seconde est une structure triangulaire reliée à un moniteur qui permettrait à des objets de rentrer en lévitation grâce à l’électricité. La reconstitution «approximative» rendant le dispositif inutilisable, Christian Frosi joue sur la déception du spectateur. D’autant plus que la lévitation, comme l’envol, fait partie depuis toujours des phénomènes surnaturels les plus fascinants.

Nick Laessing reprend, lui, une invention récente qu’il intitule The Place of the Material in the Universe is that of an Exquisitely Beautiful Precipitate or Varied Cloud-Work in the Universal Aether. Il s’agit d’un dispositif qui produit plus d’énergie qu’il n’en nécessite pour fonctionner : une machine utopique au mouvement perpétuel créée par l’Américain John Bedini en 2003.

Les artistes portugais Jaoa Maria Gusmao et Pedro Paiva, s’inspirent, quant à eux,  d’une expérience optique de Descartes pour créer un Eye Model (modèle d’œil) composé d’œuf d’autruche et de lentilles optiques. 

Athnasios Argianas propose une invention de son cru. Également musicien, il effectue deux tentatives donner forme visuelle à du bruit. Le résultat : deux formes irrégulières — l’une grise (Proposal For Reading Consonants As Noise (Black)), et l’autre de couleur cuivre (Proposal For Reading Consonants As Noise (Verdigris)) — sont encastrées dans une structure de métal sur laquelle sont posés des criquets en métal eux aussi.

Enfin, Ulla von Brandenburg joue avec la photographie spirite qui cherchait à faire apparaître sur la pellicule des phénomènes invisibles. Dans Geist, on voit une personne recouverte d’un drap blanc qui court jusqu’à disparaître du cadre.

Un ensemble de photographies, dessins, aquarelles et diapositives complète ces reproductions d’inventions, dans une démarche plus illustrative. Dans Macrocefalia, de Jaoa Maria Gusmao et Pedro Paiva, un crâne flotte au-dessus d’une table dans une pièce très sombre et fait écho au dispositif de lévitation de Christian Frosi.

Partly Obscured Portrait (Michael left)
d’Athnasios Argianas représente un homme de profil, dont l’œil et une partie du visage sont masqués par une forme flottante faite de courbes et d’ellipses. Kit Craig propose une série de dessins qui s’inspirent de Though Form, un ouvrage de 1901 dans lequel des théosophes décrivaient des phénomènes paranormaux dont ils prétendaient avoir été témoins.

Magic de Goshka Macuya est une projection de diapositives issues d’un ouvrage de 1898 qui dévoilait les trucs des magiciens, et les trésors d’ingéniosité dont ils sont capables pour mettre en scène des phénomènes surnaturels. Réalisée in situ comme la plupart des œuvres de Goshka Macuya, l’installation aux airs de cabinet de curiosités met en évidence la naissance à la fin du XIXe siècle d’une incrédulité face à ces phénomènes, aidée par les nouvelles découvertes scientifiques.

Enfin, Ulla von Brandenburg tente de représenter un fantôme dans l’aquarelle Spectre I : seuls les contours très colorés et flous d’un homme moustachu assis sont dessinés sur un papier de soie blanc.

L’exposition réunit ainsi des artistes passionnés par les relations entre science et croyances, mais également fascinés par les scientifiques plus ou moins amateurs et praticiens occultes de tous temps, de l’inventeur August Ferdinand à Buckminster Fuller, de la théosophe Madame Bavatsky au biologiste Viktor Grebennikov.

Athnasios Argianas
— Partly Obscured Portrait (Michael left), 2008. Dessin, encore sur papier. 31 x 46 cm
— Proposal For Reading Consonants As Noise (Verdigris), 2007. Feuille de cuivre, plâtre jesmonite, bois de feuillu, métal et résine polyuréthane. 130 x 20 x 25 cm
— Proposal For Reading Consonants As Noise (Black), 2007. Feuille de cuivre, plâtre jesmonite, bois de feuillu, métal et résine polyuréthane. 130 x 20 x 25 cm

Ulla von Brandenburg
— Spectre I, 2008. Aquarelle sur papier de soie. 147,5 x 116,5 cm
— Geist, 2007. Film 16 mm noir & blanc, muet. 1 min 3 sec en boucle.

Kit Craig
— Thought Form « Wagner », 2007. Crayon, gouache et aquarelle sur papier. 66 x 56 cm
— Thought Form « Mendelssohn », 2007. Crayon et gouache sur papier. 66 x 56 cm

Christian Frosi
— Ricostruzione approssimativa di un esperimento di levitazione elettrostatica, 2005. Aluminium, bois, balsa, cuivre et moniteur. 300 x 200 x 200 cm
— Ricostruzione approssimativa di un manifesto spazialista per la television, trasmesso il 17 maggio 1952 dalla Rai di Milano, 2007. Moniteur, socle de bois noir. (60 x 50 cm) vidéo 3D en boucle.

Jaoa Maria Gusmao + Pedro Paiva
— Macrocefalia, 2006. Photographie couleur. 125 x 125 cm
— Eye Model, 2006.

Nick Laessing

The Place of the material in the universe is that of an exquisitely beautiful precipitate or varied cloud-work in the universal aether, 2004. Vue de l’installation à CELL Project Space, Londres. 230 x 100 x 120 cm

Goshka Macuga
Magic, 2006. Projection de diapositives. Dimensions variables.

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