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Extérieur, le Japon

PPierre-Évariste Douaire
@12 Jan 2008

Martine Locatelli photographie dans les jardins de Kyoto des parents avec leurs enfants. Sous fond de printemps et de frondaison, les corps se délient en se tournant le dos. De cette rencontre en impasse naît des murmures qui filent en bruissements. 

Martine Locatelli revient d’une résidence de six mois au Japon d’où elle rapporte une série de portraits. Les personnages qu’elle photographie sont toujours placé dans un paysage, de préférence dans un parc ou près d’un cours d’eau. Vu le titre de l’exposition, Extérieur, le Japon, ce choix semble approprié.

Quatre ans après la série Famille réalisée en Italie, la photographe a laissé la part belle à la couleur pour faire évoluer parents et enfants dans un cadre idyllique, sous des arbres en fleurs. L’atmosphère et le cadre correspondent à des images et à une vision du Japon que nous connaissons déjà. Si la surprise n’est pas au rendez-vous, le traitement de la couleur vient pallier ce manque.
L’intérêt ici réside moins dans le paysage que dans les poses. Sans avoir l’impression de se prêter à un jeu avec l’appareil photo, les personnes croqués semblent l’être à leur insu. Chacun regarde de son côté. Aucun regard ne vient troubler le spectateur. Le cadrage n’est jamais frontal, il n’épingle pas mais reste en retrait et attend furtivement que quelque chose se passe.

Mais voilà, rien ne se passe entre les protagonistes, ils restent silencieux, plongés dans leurs pensées, absorbés par une contemplation. D’une manière calme et apaisée, Martine Locatelli pose son appareil et attend le bon moment pour capturer ces instants volés. Mais ne nous y trompons pas, les poses et les manières sont étudiées et ne sont pas laissées au hasard. Ces mouvements si naturels ne sont pas arrachés ni enlevés, ils sont tout simplement préparés et cadrés en conséquence.

La couleur et la douceur se disputent dans des compositions épurées. Une petite fille est habillée en rose. Elle est juste en dessous d’un cerisier en fleurs. L’ensemble rose rappelle Azalée (2004) réalisé l’année dernière. Au mur de fleurs réunissant quarante images de fleurs succède des correspondances moins all over mais toujours aussi condensées.

Martine Locatelli poursuit ses interrogations sur le portrait et parvient à concilier plusieurs recherches à la fois. Dans sa quête de la couleur et sa persistance à assigner les gens dans des situations et des postures où tout leur être est interrogé.
Les jardins de Kyoto sont le cadre dans lequel se glissent ces confidences et ces secrets à peine murmurés. Ils sont étouffés mais restent audibles. La photographe tend un objectif en guise de micro à ces paroles qui s’échappent graduellement, et dont il faut capter les échos et les ondulations.

Martine Locatelli :
Extérieur-le Japon n°1 à n°10
, 2005. C-print. 60 x 60 cm.

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