ART | CRITIQUE

Expression-Janus

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@07 Juil 2009

Yann Géraud invité par le Frac Alsace, occupe à Sélestat la chapelle Saint-Quirin avec une installation intitulée Expression-Janus où cohabitent chaos et rigueur militaire.

En entrant, on est confronté à un entassement qui s’avère être une construction s’étendant sur toute la longueur de la chapelle. La «sculpture»,  ainsi nommée par Yann Géraud, divise l’espace en deux empêchant les visiteurs d’appréhender la totalité de la pièce. Ce barrage de fortune est, à l’instar des barricades, élevé à l’aide d’objets recyclés, en particulier une ancienne sculpture de l’artiste: Erehwon P.O.V. Elle constitue la matière première de la nouvelle création qui est soutenue par des planches recouvertes de rayures semblables à celles des chantiers de construction.

L’artiste a agencé des éléments hétéroclites: deux barques sont disposées l’une derrière l’autre, sur lesquelles sont placées dix paires de rames tendues vers le plafond tandis que des peintures réalisées à partir de photographies, issues de la presse, sont fixées sur des armatures en fer. Entre les deux embarcations des écrans éteints sont fixés sur une maquette de paysage. Les barques voguent sur des tas de crânes. Ils se dirigent à contre sens de la porte d’entrée, vers un horizon inconnu symbolisé par une photographie, placée à la proue d’une des barques, représentant un paysage avec la mer à perte de vue.

Face à cette barricade, sur la gauche, adossé au mur et sur toute la longueur de la salle, Yann Géraud a improvisé un atelier de fabrication et de stockage de maquettes de volcans. Là, sont disposés des dizaines de volcans de toutes les tailles et de toutes les couleurs. Les cratères contiennent de la peinture liquide qui déborde sur les parois des volcans imitant les coulées de laves lors des éruptions.

La confusion et le désordre apparents suggèrent le déchainement de la nature et des hommes, celui-là même qui précède le chaos. La destruction, chez Yann Géraud, est associée à la contestation. Derrière la violence et l’ésotérisme de ses œuvres, se cachent ses aspirations romantiques et poétiques.

De l’autre côté de la barricade, l’artiste a conçu un espace plus calme composé de quatre modules posés sur le sol, bien alignés et de même dimension, mais de hauteurs différentes. Une estrade rectangulaire kaki est accolée à une table de billard où sont disposés des schémas tactiques et des plans d’attaque. En face, des lampadaires noirs sont allumés et une tente en bois est recouverte d’un film plastique translucide et éclairée de l’intérieur par des néons disposés au sol.

Yann Géraud envisage ses expositions comme des chantiers en construction dans lesquels il met en scène le passage d’un état à un autre. Dans Expression-Janus le chaos et le désordre font place à l’ordre et au calme. Tel Janus, Yann Géraud est un passeur  — de la culture, de la mémoire, mais aussi de certaines valeurs.

Yann Géraud
— Expression-Janus, 2009. Installation.

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