ART | CRITIQUE

Exposition collective

PSarah Ihler-Meyer
@21 Juil 2010

La mort prématurée, provoquée ou imposée, relie les travaux de Serena Carone à ceux de Gretchen Ryan et d’Hidde van Schie. Chacun de ces artistes conçoit des petits monuments kitsch à la mémoire d’adolescentes prépubères, de jeunes couples mais aussi de pieuvres.

Loin de toute pompe, Serena Carone, Gretchen Ryan et Hidde van Schie élèvent des memento mori acidulés aux couleurs pop. La vie de couple, les bébés mannequins, mais aussi le monde animal, sont rappelés à la mort et à la réification qui les guettent.

Ensemble pour la vie 1 et 2 de Serena Carone présentent deux jeunes couples en cire qui se regardent et entrecroisent leurs mains béatement. Leur jeunesse et leurs expressions heureuses feraient basculer cette œuvre du côté de la mièvrerie s’ils n’étaient sous verre et si des fleurs, ainsi qu’une meute de ras, ne les entouraient, donnant une tonalité glaciale à l’ensemble. Les couleurs pastel et la niaiserie des motifs virent au cauchemar d’une vie conjugale étouffante et mortifère.
Cette vision désabusée du couple se retrouve dans Liberté, également de Serena Carone. Enfermés dans une cage en bois, deux petits oiseaux assis l’un à côté de l’autre sur un banc s’ennuient à mourir. La privation de liberté et la mort qui s’ensuit semblent définitivement être le devenir du couple.

Au-delà de la mort, c’est la réification des animaux par les hommes qui pointe dans Souvenirs 1, 2 et 3, toujours de Serena Carone. Il s’agit de trois pieuvres en cire placées sous cloche. Tels des papillons épinglés, ces monstres marins ont été arrêtés en pleine course pour être réduits à l’état de choses observables et manipulables.

Quand ce n’est pas le monde animal, c’est le genre humain lui-même qui devient objet. En l’occurrence des fillettes entrainées par leurs parents dans des concours de beauté, avec Sky Tinley, Blue Tinley, Amanda et Trinity de Gretchen Ryan. Poudrées, maquillées, embagousées et accoutrées en princesses cheap, elles prennent la pose qui finit de les désubjectiviser et de les réifier en Lolita obscènes.

Enfin, Hidde Van Schie peint des bad trips psychédéliques dans lesquels la nature menace de toutes parts l’humanité. Une chouette sur fond de tempête prend des allures de grande faucheuse, tandis que des femmes dénudées luttent sur d’étranges planètes contre des formes indéterminées.

— Serena Carone, Sans titre, 2004. Plastique, terre, colle et métal. 65 x 23 x 20 cm. Pièce unique
— Serena Carone, Ensemble pour la vie 1 et 2, 2010. Cire modelée et coulée. 66 x 83 x 19,50 cm.
— Serena Carone, Souvenir 1, 2 et 3, 2010. Pate à bois peinte et enduite de cire molle. 36 x 24 cm.
— Serena Carone, Ce que je vois, 2010. Verre, plâtre, peinture. 14 x 5 cm.
— Serena Carone, Liberté, 2010. Pate à bois peinte. 17 x 27 x 15 cm.
— Gretchen Ryan, Sky Tinley, 2010. Huile sur lin. 25,5 x 20 cm.
— Gretchen Ryan, Blue Tinley, 2010. Huile sur lin. 24,5 x 20 cm
— Gretchen Ryan, Amanda, 2010. Huile sur lin. 25,5 x 20 cm.
— Gretchen Ryan, Trinity, 2010. Huile sur lin. 61 x 46 cm.
— Hidde Van Schie, Bird With Crystal Eyes, 2009. Peinture à l’huile, peinture acrylique, peinture en bombe sur toile. 250 x 200 cm.
— Hidde Van Schie, Underneath the Moonstone Sky II, 2010. Tirage lambda contrecollé sur pvc. 77 x 28 cm.
— Hidde Van Schie, Underneath the Moonstone Sky, 2010. Tirage lambda contrecollé sur pvc. 86 x 62 cm

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