ART | CRITIQUE

Evidences or This Object of Desire

PStéphane Lecomte
@12 Jan 2008

Chris Sharp, commissaire de l’exposition «Evidences or This Object of Desire» à la galerie In Situ, a sélectionné six artistes dont les œuvres apparemment simples — évidences —, ou transfigurant le banal en poésie. Le tout épicé d’un brin d’ironie.

Chris Sharp propose une sélection d’œuvres d’artistes américains sous le titre «Evidences or This Object of Desire». Le titre est intriguant comme la plupart des œuvres présentées.
Il y a d’abord ce tas de sable, placé en plein milieu de la galerie, Sand Piece (1971) de Paul Kos. On tourne autour, mais c’est en descendant au sous-sol que l’on s’aperçoit être en face d’un sablier géant. Un trou minutieux percé entre les deux étages laisse couler le sable, formant un cône parfait au sous-sol. L’œuvre mouvante, en évolution constante, apparaît et disparaît.

L’éphémère caractérise d’autres œuvres. Toujours au sous-sol, Paul Kos a rassemblé des micros autour d’une flaque d’eau : The Sound of Ice Melting propose d’écouter le bruit de deux blocs de glace en train de fondre.
Paul Kos a toujours été intrigué par la poésie des matériaux bruts et simples tels que la glace, le fromage, ou encore une simple chaise. Il manifeste un réel intérêt pour les objets communs, pour l’expression du temps, pour l’éphémère.

Au sous-sol, Charlie Foos présente Allegorical Self-Portrait (2005). Un pigeon empaillé est placé devant un petit miroir. L’oiseau semble s’admirer. Le pigeon est mis en valeur par l’artiste qui a l’habitude de s’attacher aux anti-héros que nous sommes tous. Ce n’est pas le premier autoportrait ni la première fois qu’il utilise le pigeon. Un portrait de pigeon à l’huile sur toile a été réalisé en 2003.
Charlie Foos met en valeur le banal en réenchantant les objets simples des anti-héros. En 2002, il a rendu hommage à la nature en plaçant une plante en plastique dans un coin. Ici, un pigeon empaillé est posé face à un miroir pour L’Allégorie de l’autoportrait. Le pigeon empaillé comme l’anti-héro même. Un véritable inversement est opéré: ce ne sont pas les héros qui billent sous les feux de la rampe, mais les anti-héros de Charlie Foos.

Dans la même salle, Amy Robinson expose six dessins sur papier, Session de thérapie (3). Les motifs traitant des rituels quotidiens de la vie ordinaire se répètent sur de larges feuilles blanches simplement clouées au mur. Les sujets ne sont rien d’autre qu’une poitrine en gros plan et une plante. Un léger mouvement paraît naître de cette composition en six éléments, et par l’impression que l’on a que les dessins flottent dans ces grandes feuilles blanches.

Jeff Feld propose propose pour sa part une photo de performance Perfomance of the Only Part of Robert Rauschenberg’s Pelican That I Know (2001). L’artiste américain avait chorégraphié cette performance datant des années 60 (avec les danseurs Alex Hay et Carolyn Brown) en utilisant des toiles de parachutes. La référence de Jeff Feld à l’artiste phare du Pop Art est-elle pour Jeff Feld un moyen de s’inscrire dans la lignée de Rauschenberg?

Quant à Chance of Lifetime, il s’agit de deux boites en cartons avec des bougies sortant de l’intérieur. Au rez-de-chaussée, la première boîte ne possède qu’une seule bougie, tandis que l’autre, au sous-sol, en possède deux. Les boites sont scotchées grossièrement à l’aide d’un ruban adhésif épais. Bien qu’elles soient présentées comme des formes de vies, on peut douter de ce qu’elles renferment réellement.

Nathan Coutts présente trois pièces. Que ce soit avec Nails, qu’il considère comme des sculptures faites pour ressembler à des ongles, ou avec Pulse, une sorte de petite bosse dans le mur, ou encore avec Untitled (Glass On Wall), Nathan Coutts fait dans l’économie de moyens. Un maximun d’effets avec les plus petits moyens.
La petite bosse de Pulse nous fait éprouver une sorte d’impulsion humaine grâce à des composants éléctro-mécaniques, comme pour donner vie là où on l’attend, et où l’entend, le moins. Un travail d’une simplicité extrême mais d’une riche poésie.

Dans «Evidences or This Object of Desire» on trouve des œuvres simples ne présentant que des évidences, et d’autres s’attachant à la poésie du banal ou du quotidien. Le tout épicé d’un brin d’ironie.

Traducciòn española : Santiago Borja
English translation : Laura Hunt

Amy Robinson
— Therapy Session #3 (détail), 2005. Gouache et stylo à bille sur papier. 530 x 140 cm.

Charlie Foos
— Allegorical Self-Portrait, 2005. Miroir et pigeon empaillé. 16 x 40 x 33 cm.

Paul Kos
— The Sound of Ice Melting, 1970. 8 micros sur pieds, un amplificateur, 2 enceintes, deux blocs de glace. Dimension variable.
— Sand Piece, 1971. Sablier. Dimension variable.

Nathan Coutts
— Nails, 2005. Gouache, colle, papier. Dimension variable.

Jeff Feld
— The Chance of a Lifetime, 2006. Boîte en carton, scotch, bougie. 23 x 30 x 50 cm.

Bill Wheelock
— The Sky is Not Really Falling, 2006. Photographie numérique contrecollée sur plexiglass. 55,9 x 76,2 cm.

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