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Emmanuel Régent. Mes plans sur la comète

L’univers intérieur de l’artiste est contenu dans l’espace de la feuille, univers traversé par autant de bribes de la réalité. Celle vécue par Emmanuel Régent lorsqu’il saisit dans son carnet d’esquisses les silhouettes dans les files d’attente ou les passants d’une manifestation.

Information

Description
Caroline Smulders, Daria de Beauvais, Emmanuel Régent
Emmanuel Régent. Mes plans sur la comète

Extrait de Voyage sur la comète de Caroline Smulders
Le voyage commence en Méditerranée. À l’aube, Emmanuel Régent accompagne un vieux pêcheur de Villefranche-sur-Mer relever les filets placés la veille au soir. À 9h, de retour, il se dirige vers le bâtiment des clubs sportifs dont une partie lui a été attribuée en guise d’atelier.

Là commence le long processus du dessin qui ne se dévoilera qu’en partie, l’artiste attend le spectateur pour en révéler le reste, attitude conceptuelle qui tisse un fil d’Ariane entre des æuvres touchant aussi bien au dessin, à la peinture, qu’à l’objet.

De son expérience de la mer, Emmanuel Régent rapporte à l’atelier sa préhension de l’infini et un rapport au temps qui change de densité une fois que l’on est sur l’eau.

Ce rapport au temps qui s’allonge avec l’horizon que l’on n’atteindra jamais, Régent le glisse entre chaque trait tracé au feutre à la pointe ultra-fine. Le temps s’allonge obstinément, la feuille de papier Arches se remplit par endroits, sans hésitation; l’artiste est sûr de ce qu’il veut prendre des esquisses précédentes, des images récoltées sur le « net » ou sur le vif.

Autour du trait, l’espace du blanc, la matière papier, comme une mer d’huile. L’expérience de l’aube se vit sur la feuille. L’espace du blanc, quasi disproportionné mais toujours juste, une image dans l’image, un blanc, qui chez l’artiste devient sculptural.

Un blanc qui, petit à petit, prend la place du ciel, de la mer, de la côte. Un blanc que l’on doit s’interdire de toucher, particulièrement dans les derniers dessins de très grande taille, juste montés sur aluminium, sans encadrement. Un blanc qui fait dire au papier ce qu’il a en commun avec la peau. Un blanc qui invite l’imaginaire à tourner autour du dessin, le continuer, en inventer le sens, en définir le terme. Un blanc qui raconte sa propre histoire dans Mes plans sur la comète (2006/2010).

Quelle part de rêves évanouis ne nous dévoile-t-il pas? Quels désirs inassouvis, quels projets à venir…? Un blanc roulé de tout son long, coincé dans une poubelle trop petite, prenant cependant tout son élan, jaugeant le spectateur de tout ce qu’il ne lui a pas encore dit. L’artiste admire les Achromes de Manzoni, dont la matérialité importe plus que la blancheur.