ART | EXPO

Éloge de la suite

09 Nov - 24 Déc 2011
Vernissage le 09 Nov 2011

Mathilde Pénicaud se place volontairement dans une médiation entre le bel art, hautement élaboré, transcendantal, et l’art pauvre, résiduel, précaire, fait avec ce-qu’on-a-sous-la-main.

Mathilde Pénicaud
Éloge de la suite

Pour sa nouvelle exposition personnelle, «Éloge de la suite», Mathilde Pénicaud se place volontairement dans une médiation entre le bel art, hautement élaboré, transcendantal, et l’art pauvre, résiduel, précaire, fait avec ce-qu’on-a-sous-la-main. Elle affirme d’une part son héritage de la sculpture en fer traditionnelle—et notamment, celle d’Eduardo Chillida—, et d’autre part, elle s’en libère en investissant des matériaux plus complexes, moins purs, tels que le caoutchouc, le béton et la paraffine, et des objets manufacturés, comme le boulon et l’écrou, le clou, l’anneau et la barre d’acier usinés.

Ce n’est donc pas un hasard si les œuvres présentées évoquent tout aussi bien les mouvements contrastés d’une suite musicale que les éléments emboîtés des colonnes et tuyaux utilisés dans l’industrie du bâtiment. De cet entremêlement du trivial et du raffiné, du geste sculptural en mode majeur et de l’assemblage en mode mineur, naît la mise en tension symbolique, et l’excitation des sens: les structures en dur résonnent d’une beauté rugueuse, abrupte, hiératique, quand, à l’inverse, les petits modules mous, dégringolant le long des cimaises, font entendre un rire chatouilleux, espiègle. Le cheminement proposé est alors une oscillation permanente entre élévation de la pensée et du sentiment, et badinerie.

Une pièce importante de l’exposition en est finalement absente, du fait de son succès. Nous avons décidé avec l’artiste de nous saisir de cette contrainte pour nous jouer de sa pratique de sculpteur tout en en soulignant le caractère composé et réfléchi. Avec un projecteur de diapositives et la photographie du dessin préparatoire qui a conduit à la réalisation de la pièce manquante, nous avons créé un dispositif scénographique, fondé sur deux qualités essentielles du langage esthétique de Mathilde Pénicaud, à savoir, le séquençage et le jeu de contrastes entre espaces pleins (le son et l’image) et espaces vides (le silence et l’écran blanc).

Ce dispositif élimine totalement la notion de matière sans éliminer la notion de corporalité: l’implication de l’observateur ne tient plus du tactile ni du rapport entre sa propre masse et celle de l’œuvre, mais des stimulations rythmiques auditives et visuelles. Ce dispositif, qui nous éloigne momentanément du matérialisme, permet de mieux appréhender l’idée qui préside au geste sculptural de Mathilde Pénicaud, de sentir l’abstraction qui le guide. Une occasion pour nous de montrer les analogies par lesquelles le travail de cette artiste s’inscrit dans une relation de suite entre les grands maîtres «métallos» et les approches informelles de la sculpture dite «contemporaine».

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