ART | EXPO

Ecran somnambule & La part du rite

28 Fév - 28 Fév 2014
Vernissage le 28 Fév 2014
PGilles Amalvi
@19 Fév 2014

Quelle est La part du rite dans le rapport entre corps et discours articulé, art et transformation sociale? Le deuxième temps de la résidence de la chorégraphe Latifa Laâbissi s'intéresse à la notion de re-enactment, explorant notamment un corpus de partitions puisées dans les arts vivants et des faits historiques.

Latifa Laâbissi
Écran somnambule & La part du rite

Contextualisant la question de la présentation d’oeuvres chorégraphiques en lien avec les modes opératoires de la recherche, ce deuxième temps de la résidence de la chorégraphe Latifa Laâbissi s’ouvrira avec deux pièces: Écran somnambule et La part du rite.

Écran somnambule
Un bloc compact au milieu de l’espace nu. Un visage, impassible et grimaçant. Une sculpture immobile, mais qui semble pourtant bouger, s’étirer, se contracter, tendre sa matière jusqu’à la limite d’elle-même. En choisissant de danser, aujourd’hui, au ralenti, la Danse de la sorcière de Mary Wigman, Latifa Laâbissi nous place en face d’un mirage, déréglant le statut de cet objet «historique» et brouillant les pistes d’interprétation.

Pièce majeure de l’expressionnisme allemand, la Danse de la sorcière a laissé derrière elle une trace incomplète, qui continue de hanter l’inconscient de la danse à la manière d’un mauvais rêve: un film de 1 minute 40, datant de 1926, qui montre Mary Wigman au bord de la transe, les membres comme électrifiés, réagissant aux rythmes sourds des percussions.

Cette esthétique du contraste, de la rupture abrupte, où le corps devient le traducteur d’états contradictoires, comment en restituer le potentiel perturbateur sans la momifier? Ne reproduisant que ce que montrent les images du film, Latifa Laâbissi se glisse dans le corps de la sorcière, et plonge la scène dans un état hypnotique où chaque mouvement dévoile sa lente construction. A la fois matériau et archive, cette silhouette discordante produit une série d’écarts – aussi bien perceptifs qu’historiques – amenant à repenser le rapport de la danse à sa reproduction, à son histoire, à ses zones de refoulement. (Gilles Amalvi)

La part du rite
Vous distinguez une forme immobile sous un tas de serviettes blanches. Une silhouette s’active autour d’elle, l’entoure de gestes minutieux. Puis vous distinguez une voix, sans être tout à fait sûr de sa provenance: une voix qui parle de danse amateur, de danse révolutionnaire, évoque le rapport entre pratique physique, discours et utopie dans l’Allemagne des années 20.

Vous regardez deux corps à la tâche qui s’engendrent l’un l’autre, réactivant un espace-temps paradoxal d’où penser la danse en tant que force agissante. Quelle est La part du rite dans le rapport entre corps et discours articulé, art et transformation sociale? A la fois conférence, performance, installation, cette pièce creuse le lien unissant chair et mots pour en révéler les zones de creux, de heurts, les résidus, les devenirs. Dans une tension constante entre manipulation, articulation et désarticulation, une chorégraphe et une théoricienne de la danse cherchent à brancher des idées sur des états, à explorer différents régimes esthétiques pour en questionner l’actualité.

Formant avec Écran somnambule un objet dialectique, reflétant les paradoxes des débuts de la modernité et l’invention d’un art chorégraphique simultanément «puissance magique et puissance critique», La part du rite secoue l’archive pour en réveiller les fantômes, et proposer un montage au présent. (Gilles Amalvi)

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