ART | CRITIQUE

Désirer la flamme avant le brasier

PMarie-Jeanne Caprasse
@12 Jan 2008

Décomposer la forme puis la recomposer, minutieusement, à l’aide de matériaux simples et fragiles comme des aiguilles et des perles de verre. C’est de cette manière que Myriam Mechita façonne son univers grinçant et trouble.

Avec des perles et des aiguilles, Myriam Mechita compose un univers trouble et sombre. Des perles de verre coloré pour déposer des touches de couleur à la surface des formes et des aiguilles comme point d’ancrage, colonne vertébrale ou zone nerveuse qui structure le motif.

Dans sa nouvelle série de tableaux sur polystyrène, les épingles restent à la surface du support et s’agglutinent le long des traits du dessin. Surplombant les perles, ce sont les aiguilles, visibles sur toute leur longueur, qui se présentent à l’œil comme une multitude de petits traits discontinus. Elles introduisent un relief menaçant sur les paysages de ville et font transparaître la douleur et l’angoisse dans des compositions comme SOS ou Le Chant de l’ange.

La répétition, la constellation du motif par des centaines de fines aiguilles de métal, brouille la vision et uniformise l’ensemble. Vu de côté, le sujet du tableau disparaît et l’on ne distingue plus qu’une sculpture verticale faite d’une multitude d’aiguillons de fer. Par cette multiplication, l’artiste favorise la circulation entre les différents éléments de l’œuvre et obtient des images insaisissables, fluctuantes, pensées sous l’angle des 3 dimensions.

On retrouve également ses sculptures d’animaux, des âmes de chevreuil en polystyrène habillées de strass ou de billes de verre. Le côté chamarré, clinquant, contraste avec les mises en scène morbides. C’est toujours de douleur et de destruction qu’elle nous parle, en utilisant le discours de l’outrance et de l’accumulation.

Avec ses constructions systématiques, répétant le même geste de dépose d’une perle et d’une aiguille, l’artiste construit une œuvre qui capture en son sein le temps de son élaboration. La thématique du temps qui passe est d’ailleurs souvent apparente dans ses titres comme dans Le Temps suspendu ou Rever for Ever. Car il faut voir dans son travail méthodique et astreignant un désir profond de saisir le temps de l’œuvre et d’en faire une de ses matières premières.

Myriam Mechita
— Le Chant de l’Ange, 2006. Polystyrène extrudé, perles de verre, épingles, bois. 123 x 117 cm.
— Forum Antica mon Amour , 2006. Polystyrène extrudé, perles de verre, épingles, bois. 123 x 117 cm.
— Le Temps suspendu, n.d. Polyuréthane et paillettes bichromes. 43 x 110 x 110 cm.
— SOS, 2006. Polystyrène extrudé, perles de verre, épingles, bois. 123x 117 cm.
— Rever for Ever, 2006. Polystyrène extrudé, perles de verre, épingles, bois. 123 x 117 cm.

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