ART | CRITIQUE

David Renggli

PAnne Malherbe
@12 Jan 2008

Comme lors de sa précédente exposition, la galerie Chez Valentin se transforme en remise à bric-à-brac. Il s’agit cette fois d’une présentation de David Renggli. Ce jeune artiste place son exposition sous le signe de la Mélancolie de Dürer, révélant son obsession de la conservation morbide des objets.

David Renggli est un atrabilaire. L’ange de la Mélancolie, délaissant les outils du savoir et conscient de la vanité qu’il y a à s’avancer sur le chemin infini de la connaissance quand la mort est inéluctable: telle est ici l’attitude de l’artiste. Alchimiste, il a pris des objets qu’il a figés avant d’aller jusqu’au bout de leur métamorphose.

Des restes hétéroclites de la vie quotidienne, des animaux, des plantes sont exposés dans des tableaux-boîtes remplis d’alcool. Ils s’y retrouvent après leur vie terrestre, sans rapport les uns avec les autres, comme dans un purgatoire sans issue. Il ne s’agit pas d’un nouveau Spoerri qui fixe tels quels les reliefs d’un repas. Dans le cas présent, on comprend que le processus devait se prolonger, qu’un au-delà de l’état initial était attendu, qu’une fusion, une transformation auraient pu se produire mais que, pour une raison ignorée, l’entreprise a été abandonnée. A peine amorcé, l’enchantement se désenchante.

Conscience d’un Faust qui a décidé de ne pas y laisser son âme? Constat d’impossibilité? Lucidité vis-à-vis d’un enchantement qui n’a pas de raison d’être?
Le reste de l’exposition accentue l’ironie de ce romantisme noir.

Des ballons se suspendent aux poutres de la galerie. Ce n’est pas leur légèreté qui les a délivrés des lois de l’apesanteur. A moitié déchirés, ils montrent leur intérieur de mousse qui a permis de les accrocher au plafond. L’artiste apprenti sorcier a préféré révéler, dans un auto-sabordage désespéré, ses tours de passe-passe illusionnistes.
Mais ce n’est pas la seule interprétation possible de ce grenier de vieux jouets. Il y a aussi le plaisir maladif de figer des choses impossibles, telles ces chaises inutilisables posées dans un coin et ces couronnes mortuaires — en réalité des bouées recouvertes de post-it.

Du cabinet de curiosité, dont l’exposition est un avatar, il reste seulement l’aspect morbide, toujours mis à distance par un humour qu’on aimerait voir un peu moins timide.

Traducciòn española : Maïté Diaz
English translation : Margot Ross

David Renggli
— Es widerspricht jeglicher mit anerzogenen logik dass, das N auf das M folgt, 2006. Papier Post-it, bois, structure plastique. 220 x 220 x 160 cm.
— I Left You The Key, 2006. Polyuréthane, métal, cigarette. 285 x 260 x 350 cm.
— Im Windschatten, 2006. 2 ballons mousse polyuréthane. 36 x 30 x 60 cm.
— Ikea and Tina Turner, 2006. Mousse polyuréthane, structure plastique. 100 x 56,5 x 68 cm.
— 20.5.2006.23.15.17354 h, 2006. 1 ballon mousse polyuréthane. 30 x 20 cm.
— Unabsichtlich oder absichtlich zerstortes Bild, 2005. Polystyrène, F18, bois, couleur en laque. 190 x 100 x 100 cm.
— Who Was First, 2005. Verre, alcool, bois, légumes, objets divers. 31 x 40 x 9 cm.
— Vom Unmöglichen zun Möglichen (de l’impossible au possible), 2005. Céramique émaillée. 25 x 25 cm.
— Condensed Pub, 2006. Matériaux divers. 300 x 300 x 180 cm.

AUTRES EVENEMENTS ART