DANSE | SPECTACLE

Rencontres Chorégraphiques | Romance en stuc

17 Juin - 18 Juin 2019

Trente-cinq ans et pas une ride : c'est toute la magie d'une actualisation aussi fidèle que soignée. Avec Romance en stuc, le chorégraphe Daniel Larrieu, emblème de la Nouvelle danse, reprend l'une de ses pièces clés, créée en 1985. Une refonte précédée de celle de Chiquenaudes.

En 1985, Romance en stuc, de Daniel Larrieu, fait sa première en Avignon au Cloître des Célestins. Le décor y est alors teinté de baroque, déployant des sortes d’à-plats figurant un intérieur cossu. Avec de vastes portes ornées, ainsi qu’un papier peint à motifs géométriques. Trente-cinq ans plus loin, le chorégraphe Daniel Larrieu réactive Romance en stuc (2019). Au décor fourni s’est substituée une alternance de vides et drapés, tombant sobrement dans un coloris clair et uni. Comme pour délimiter en pointillé l’espace de la scène. Pièce pour onze danseurs, Romance en stuc s’inspire du roman fantastique Spirite (1865) de Théophile Gautier. Une nouvelle dans laquelle l’ennui d’une vie sans éclat se voit ranimé par la possession. Ce supplément d’âme venu de l’au-delà. Actualisée par Daniel Larrieu et Jérôme Andrieu, Romance en stuc no 2 garde tout de son décalage chorégraphique.

Romance en stuc de Daniel Larrieu : de 1985 à 2019, une refonte fidèle

Sur une composition sonore de Jean-Jacques Palix et Ève Couturier (probablement connus des habitués des Nuits Magnétiques, sur France Culture), les danseurs se décadrent dans une danse structurée. Représentant de la Nouvelle danse française, Daniel Larrieu n’a cessé de cultiver l’expérimentation chorégraphique. Et la réactivation ne fait qu’en souligner l’actualité. Scénographie simplifiée ; costumes épurés, colorés et saillants — de Didier Despin et Catherine Garnier, à partir du travail de Mark Betty ; avec des accessoires et perruques de Daniel Cendron —, la pièce oscille entre les époques. Un peu à la façon des statues peintes du Mépris de Jean-Luc Godard. Quand de larges touches de peinture bouleversent les codes de représentation, brouillant alors les repères chronologiques. Amour, romantisme et frissons d’émotions : Romance en stuc joue sur la chair du XIXe siècle. Avec son Europe droguée aux grands sentiments, quitte à verser dans l’occultisme du Romantisme noir.

Chiquenaudes et Romance en stuc, la vigoureuse Nouvelle danse de Daniel Larrieu

Mais solaire, Romance en stuc désamorce l’obscurité par des mouvements francs, presque tranchés, sans flottements superflu. Si la bande sonore joue la carte du mixage (voix, extraits textuels, musiques, fréquences…), la danse se fait claire et distincte. Réactivée parallèlement au trio espiègle Chiquenaudes (1982), Romance en stuc assume sa structure. Et comme les perruques rigides, de couleur vive, qui façonnent les chevelures des danseurs aux visages peints, la pièce déploie presque une rondeur ludique. Cette limpidité, avec ses lignes claires, vient en contrepoint d’une histoire heurtée. Soit celle d’un couple séparé par le destin. Personnifié par une sorte de maître pratiquant les arts martiaux, avec sa gestuelle aussi émaciée que sèche, le destin tranche les liens. Et le couple se sépare. À cette suffocation, la danse répond par le rythme, la cadence, la couleur. Une colonne vertébrale solide, comme en atteste la vigueur de cette Romance en stuc no 2.

À retrouver dans le cadre des Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis 2019, précédé du trio Chiquenaudes (9 mn).

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