ART | CRITIQUE

Damien Cabanes

PMarie-Jeanne Caprasse
@12 Jan 2008

Un monde directement connecté à celui de l’enfance : spontanéité, légèreté, fraîcheur des couleurs et jeu de construction des volumes. Gouaches et sculptures de Damien Cabanes interrogent les formes de la couleur avec un regard emprunt de simplicité et de spontanéité.

La spontanéité demande un long travail, une recherche vers toujours plus de simplicité. Sculpteur, Damien Cabanes assemble des formes simples et brutes, en travaillant sur les vides et les pleins, l’accumulation et le placement des couleurs. Peintre, il épure les signes et les gestes.

Assemblages de formes organiques, cinq imposantes sculptures en plâtre peint occupent le sol de la galerie. Elles répètent une même forme : un socle conique sur lequel sont plantés des bras de bois soutenant de grosses boules colorées. Le gabarit de chaque sculpture comme le jeu des couleurs entre les boules varie. Les teintes sont acidulées, la couche de gouache est uniforme et comme jetée sur la surface granuleuse du plâtre.

Travaillant la couleur en trois dimensions, Damien Cabanes exploite ses propriétés spatiales et en fait un élément fondamental de la sculpture. Elle peut modifier les volumes, les agrandir, les rétrécir, les éloigner, les rapprocher… Pourquoi alors ne pas l’utiliser dans la sculpture comme pratiqué dans des temps plus anciens comme l’antiquité ou le Moyen-Age?

Ses formes brutes, encore mal définies, sont comme en devenir. Les éléments agencés peuvent être démontés et remontés, les codes d’exécution et la structure restant apparents. Le plâtre est grossièrement mis en forme et rugueux. Les couleurs semblent fragiles. On ne sait pas si la sculpture est en train d’apparaître ou de disparaître.

Contrastant avec cette exubérance de formes et de couleurs, les gouaches de Damien Cabanes semblent en lévitation sur les murs blancs de la galerie. L’emploi de la couleur est différent. Dans les sculptures, la peinture est badigeonnée uniformément sur le plâtre mouillé, le volume du support créant les ombres et les lumières, tandis que sur la surface plane, la couleur est pensée en valeurs.

Travail figuratif, sur le modèle, ses gouaches sur papier reposent sur l’observation du réel. Mais Cabanes a gardé de sa pensée de l’abstraction, une réflexion sur les pleins et les vides, avec une présence prépondérante du blanc du papier.

Prenant pour modèle des enfants, Cabanes doit travailler vite. Tout est fait d’un seul trait. Il multiplie les poses et les esquisses. Parfois, dès les premiers gestes, la composition trouve son équilibre, comme dans Fleurs I ou Sophie I. Avec un minimum de traits de couleur, il réussit à évoquer une position, un geste et une lumière.

A d’autres moments, il va plus dans le détail comme dans Samuel endormi et Laura sur le canapé vert. Le trait est toujours vif et spontané mais plus fouillé. Sur un grand aplat vert suggérant le canapé, viennent reposer deux personnages aux visages émouvants. Et dans sa recherche de l’essentiel, Cabanes parvient à suggérer un visage endormi par l’agencement mystérieux de quelques traits.

Un travail purement visuel, sans références littéraires ni conceptuelles, où les couleurs et l’émotion jouent un rôle prépondérant. L’artiste veille toujours à se laisser surprendre, ne rien préméditer et laisser libre cours au geste créateur. Au final, c’est son regard qui détermina ce qui fait œuvre. Et à Damien Cabanes d’ouvrir la réflexion en déclarant : « je crois que tout ce qui a une explication n’est pas de l’art, mais que se poser des questions est le but de toute œuvre d’art ».

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