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Conversations avec une âme défunte

PCarine Pouvreau
@12 Jan 2008

Les créations oniriques de Françoise Vergier sur le thème de la mort et du deuil font se télescoper la pensée traditionnelle et la pensée contemporaine. Installations, sculptures et dessins participent d’un rite de passage.

Les œuvres récentes de Françoise Vergier présentées à la galerie Claudine Papillon nous font partager une expérience de deuil qu’elle a vécue et transfigurée par l’art.
Afin d’exorciser sa douleur due à la perte d’un être cher, Françoise Vergier a réalisé des sculptures, objets symboliques et poétiques, renouant avec la pensée magique des sociétés traditionnelles qui envisage la mort comme faisant partie de la vie, afin de rompre un tabou et repenser l’humain et le cosmos.

Quatre portiques en bois peint sont disséminés dans la galerie. Chaque pièce, unique, s’inspire des bûchers de crémation des rites funéraires existants encore dans certaines cultures traditionnelles, notamment en Inde et au Tibet.
Françoise Vergier confronte les matières et les formes, et du chaos fait naître l’harmonie. La géométrie des portiques colorés côtoie la rondeur immaculée des têtes en terre cuite émaillée sur lesquelles sont accrochées des breloques en métal et en verre.
Des branches d’arbre secouent leurs grelots. Des lanières de tissu aux couleurs vives soutiennent des visages tendres et torturés sculptés dans la masse, comme autant de paquets lestés d’âmes en lévitation. Des sacs de jute entassés et des livres empilés s’échappent des phrases familières contenant les mots «vie» et »mort».
Accroché au mur, un tableau-sculpture naïf et énigmatique abrite des pieuvres en terre cuite évoluant sur le dessin d’une montagne au lavis noir.

Plusieurs œuvres, moins récentes, comme l’installation Le Sel de parents évoquent les parents morts de Françoise Vergier. Symbole de la barque transportant les âmes vers le pays des morts, une coque de bois tendre, recouverte d’un parchemin tendu comme une peau délicate, devient le réceptacle de deux petits crânes blancs immaculés. Évocation moins morbide que sacrée, relique précieuse.

Créer est une façon pour Françoise Vergier de s’apprivoiser la mort, de regarder la mort en face, avec intelligence, tendresse et spiritualité. Entre métaphysique, anthropologie et mythologie.

Françoise Vergier
— Superstition, 2007. Terre cuite peinte émaillée, bibelots. 36 x 25 x 30 cm
— Conversations des âmes sœurs, 2006. Socle, portique en bois, terre cuite émaillée, épis de lavande, bibelots.
235 x 200 x 120 cm
— J’ai secoué mes grelots, 2007. Socle, portique en bois, branches de chêne, grelots, hauts-parleurs, socle médium noir, pierre calcaire. 187 x 200 x 120 cm
— La Périgrination des âmes, 2007. Socle, portique peint, sept terres cuites dont une émaillée, étoffes.
87 x 214 x 150 cm
— Conversations autour d’un bureau, 2006-2007. Socle, portique en bois peint, bureau, terre cuite émaillée, bibelots, livres. 197 x 200 x 120 cm
— La terre des paysans, 2007. Fusain, pastel. 130 x 132 cm
— Le Chant de la nuit, 2007. Fusain, lavis. 130 x 132 cm
— Je suis montagne, 2005-2007. Cadre en bois, dessin lavis, plomb, fil métallique, terre cuite émaillée.
75 x 169 x 8 cm
— Sel des parents, 1995. Socle, structure métallique, bois de tilleul, parchemin, crânes, terre, verre bombé.
145 x 71 x 50 cm
— Les Prades, 2005. Lithographie. 75 x 110 cm

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