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Construction/Déconstruction

PCarlotta Bailly Borg
@12 Jan 2008

Les photographies d’architecture de Jean-Claude Gautrand développent une vraie poésie géométrique. Ces images empreintes d’une beauté douloureuse racontant Paris, la ville, ses constructions, son évolution incessante. Un prélude à l’actualité.

Auteur d’une œuvre photographique en noir et blanc qui s’étend sur plus de quarante ans, Jean-Claude Gautrand appartient à cette génération qui a milité pour la reconnaissance de la photographie d’auteur. Il a également signé une vingtaine de livres, du Paris des photographes au dernier, en 2005, sur Willy Ronis.

L’Assassinat de Baltard. En 1971, Jean-Claude Gautrand photographie la destruction de la première architecture métallique de la capitale: les halles de Baltard. Entre métal, lumière et fumée, les vues en noir et blanc traduisent cette véritable rupture historique avec une réelle douleur, un combat contre le temps.
Pourtant, à travers un très significatif penchant à l’épure, au dosage et au contraste des ombres, à l’exaltation des contours, l’image dit la splendeur des rayons qui traversent la poussière, et la danse des structures métalliques démantibulées.
Les clichés sont autant d’images de mémoire, de cris de colère et de douleur. Elles retiennent en quelque sorte les halles sur le point de s’évanouir.

Métalopolis, construction du périphérique parisien, 1964. Avec une esthétique froide, proche de l’abstraction, inspirée d’Otto Steinert et de son livre Subjektive Fotografie, Gautrand propose une véritable poésie par l’image. Très graphique, cette série transforme en traits purs l’architecture de métal avec ses rails, ses poutrelles, ses échafaudages porteurs de villes futures.
En se référant explicitement au film de Fritz Lang, ces images évoquent la technologie de l’industrialisation, la déshumanisation, la vie artificielle, avec une portée étonnamment actuelle.

Entre construction et déconstruction, les photographies de Jean-Claude Gautrand sont présentées dans une continuité temporelle, en séquences plus qu’en séries.

Avec L’Assassinat de Baltard, l’exposition commence par une vue du toit des halles du cœur de Paris, puis nous fait peu à peu assister à la lente chute du bâtiment. Dans Métalopolis les images dévoilent étape par étape la construction du périphérique, comme si il s’agissait d’une suite chronologique naturelle. On ressent ainsi l’évolution et la dynamique des chantiers, ente construction et déconstruction.

Les images de Jean-Claude Gautrand traduisent toute l’énergie des bouleversements architecturaux, de l’évolution de la capitale dans les années soixante et soixante-dix. Mais, par delà le passé, elles expriment la situation actuelle des grandes capitales : la saturation urbaine, l’évolution technologique, les flux humains.

Dans l’œuvre de Jean-Claude Gautrand, un calme équilibre entre les volumes et les lignes se combine avec une inquiétude, une indignation, voire une colère, qui confèrent à l’harmonie des formes une profondeur humaine, une sensibilité humaniste.

Jean-Claude Gautrand
— Métalopolis, 1964. Photographies argentiques en noir et blanc sur papier baryté. 50 x 60 cm.
— L’Assassinat de Baltard, 1971. Photographies argentiques en noir et blanc sur papier baryté. 50 x 60 cm.

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