PHOTO | CRITIQUE

Constellations

PJulia Peker
@12 Jan 2008

Pour sa dernière exposition à la galerie Cent8, Georges Tony Stoll convoque pastels et photographies, installations visuelles et sonores. Les œuvres se font écho sans pourtant s’emboîter, se reflètent pour former une constellation ouverte.

Georges Tony Stoll est surtout connu pour ses photographies intimes: des prises de vues réalisées dans les années 90 avec un appareil automatique, avant tout des images de corps d’hommes.

Dans Constellations, les photographies sont présentées en alternance avec de grands dessins composés de formes géométriques abstraites, Space Cowboys. L’usage du pastel insuffle une vibration à ces figures qui semblent flotter sur le papier. Le tracé hésitant de leurs contours brouille la régularité et la simplicité des figures: fragiles et mouvantes, elles sont prises dans un processus d’apparition.
L’intensité de cette présence contraste avec la sobriété des formes, et les apparente aux corps fragmentés que découpent les photographies.

Cadrés de près, décentrés, tendus, enveloppés, tous les corps d’hommes sont détournés par une mise en scène insolite et mystérieuse, investie d’une violence sourde.
Homme pressé-2006 est une photographie exemplaire de cette tension des corps: elle représente un torse d’homme nu, de face, cadré jusqu’à mi-épaules et à mi-jambes, un pantalon baissé à mi-hauteur de son sexe. Une ligne de division verticale partage la photographie en son centre: deux images ont été accolées l’une à l’autre, sans être véritablement ajointées. L’image se brouille sous l’effet de ce léger décalage, abandonnant ce torse sans tête à la monstruosité d’un ventre orné d’un double nombril.
La nudité charnelle de ces corps n’est en rien une intimité au repos, et les membres tendus semblent impuissants à former une unité apaisée.

Sur une table, Georges Tony Stoll présente Mon Chef-d’œuvre-2003: trois corps de bâtiments de taille légèrement différentes, assemblés suivant de menus décalages. Les parois refusent de s’imbriquer correctement les unes dans les autres, et l’ensemble déborde de la surface de la table. L’imperfection de cette œuvre recouverte d’une peinture d’or est cela même qui en fait un chef d’œuvre: l’œuvre maîtresse à laquelle l’artiste peut s’identifier.
Le chef d’œuvre de Georges Tony Stoll brille des mille feux d’une constellation désassemblée.

Georges Tony Stoll
— Homme Pressé, 2006. Tirage photographique contrecollé sur aluminium. 140 x 100 cm.
— Space Cow Boy n°3, 2006. Pastel sur papier. 110 x 76 cm.
— Sans Titre (Paris-New york), 1998. Photographie contrecollée sur aluminium. 50 x 70 cm chacune.
— Riche, 2006. Papier noir sur papier blanc. 110 x 76 cm.
— Poing Mort, 2003. Tirage photographique contrecollé sur aluminium. 102 x 70 cm.

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