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Confins

02 Avr - 22 Mai 2011
Vernissage le 02 Avr 2011

Les photographies de Klavdij Sluban ne sont pas les dépouilles et les trophées d’un chasseur d’images, mais constituent la partie visible d’une expérience humaine d’une exceptionnelle densité.

Communiqué de presse
Klavdij Sluban
Confins

J’aidécouvert les photographies de Klavdij Sluban à l’occasion d’une exposition qui lui était consacrée à l’Hôtel de Sauroy en 2008 dans le cadre du «Mois de la Photo» à Paris. Le choc fut immédiat et l’ébranlement provoqué, durable. Un embarquement au long cours pour les confins de l’Europe centrale à bord du Transsibérien et du Transtibétain

Erri de luca qui a préfacé l’ouvrage Transsibériades consacré à ses photographies, écrit: «Le photographe a la nostalgie de la neige maternelle de l’enfance qui le rebordait dans son coin de terre, mais ici la neige est devenue une lèpre blanche, elle ne recouvre pas le sol, elle le ronge. Son silence est oppressant. Le photographe utilise rarement une vitesse d’exposition rapide pour fixer une course, un mouvement. Il laisse plus souvent un temps de pause plus long sur le diaphragme fermé, pour que le silence imprègne la pellicule. L’immobile a besoin de plus de temps pour affleurer.»

Sluban nous donne ainsi à voir d’immenses paysages livides ou crépusculaires baignant dans une lumière plombée, où l’on croirait entendre le vent de la steppe souffler; espaces désertiques dont la démesure et le vide sont rendus palpables par la présence toujours énigmatique et surprenante de l’homme ou de l’animal dont l’insignifiance nous permet en contrepoint d’en fixer l’échelle.

Le monde dans lequel se meut Sluban, est celui des plaines qu’il arpente indéfiniment en quête, peut-être, d’une révélation, de quelque chose de l’ordre du numineux; c’est le monde d’Andreï Tarkovski au croisement du vertical et de l’horizontal, du religieux et de la matière.

Les vues de lieux habités possèdent une force d’évocation et une perfection formelle égales. La distribution des noirs, des gris et des blancs découpe des espaces géométriques quasiment abstraits dans lesquels on entr’aperçoit des silhouettes de passants, de passagers de trains, des visages clos et mutiques.

La photographie de voyage, comme le reportage de guerre est un genre dont je me suis toujours défié car soit elle recherche le pittoresque, soit expose de façon suspecte la misère et les tragédies humaines.

Sluban, comme Stanley Greene et Josef Koudelka pour la guerre, n’encourt pas ce double reproche. Pour preuve les remarquables photographies prises dans les prisons et les centres pénitentiaires en France et dans plusieurs régions du monde. Une thématique pourtant très délicate à traiter, et pour Sluban une autre forme de confins à explorer, puisque la prison se situe à l’extrême frontière du territoire social.

Cela fait maintenant plus de dix ans qu’il a mis en place et anime des ateliers de reportage photographique avec des jeunes détenus, à Fleury-Mérogis d’abord, puis dans d’autres établissements à travers le monde.

Ses photographies ne sont donc pas les dépouilles et les trophées d’un chasseur d’images, mais constituent la partie visible d’une expérience humaine d’une exceptionnelle densité et traduisent la profondeur de son engagement personnel.

Klavdij Sluban explique ce choix: «Je me suis intéressé à la prison, davantage comme lieu que comme thématique. Quand je délimite mon cadre, même si c’est à un niveau aussi vaste que celui d’une région, je me cogne à un moment aux frontières, de la même manière que je me cogne aux murs des prisons, aux parois des cellules. Ma photographie de voyage et la photographie que je pratique en prison avec les jeunes détenus sont intimement liées. Elles ne sont pas antinomiques: l’une est un voyage débridé et l’autre est enfermée dans un espace confiné. Elles partent pourtant d’un même questionnement.»

Deux univers extrêmes et tragiques qui par le regard de Sluban acquièrent une dimension poétique et une unité étonnantes, au point qu’il n’est pas toujours aisé de distinguer ce qui relève du carcéral ou du monde extérieur. Un climat uniformément « slubanien » résultant pour une part du caractère polysémique et presque neutre de ses images et de leur lumière incomparable.

La magie froide et envoûtante des noirs et blancs de Sluban. Le noir à propos duquel Odilon Redon pouvait dire «il faut respecter le noir, rien ne le prostitue.» Une formule qui pourrait parfaitement s’appliquer à Klavdij Sluban.

L’exposition de l’Hôtel des Arts présente une sélection d’une centaine de photographies de Klavdij Sluban, qui couvre les différents cycles de son travail. (Gilles Altieri, directeur de l’Hôtel des Arts, commissaire de l’exposition)

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